lundi 31 décembre 2007

La participation électorale en 2007

Vite fait, en passant, pendant la trève des fêtes de fin d'année, je me permets de recommander la lecture de Insee Première n°1169 consacré à la participation des Français aux différents scrutins de 2007.

Rappelons aux allergiques de la politique que 2008 sera également une année électorale avec les municipales en mars. Il ne vous reste plus que quelques heures pour vous inscrire sur les listes électorales si ce n'est déjà fait.

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lundi 24 décembre 2007

Noël, les Francais et la consommation.

Souvenez-vous, il y a à peine deux mois, Jean-Pierre Pernault vous garantissait que les Français allaient réfréner leurs envies de consommation pour Noël. C'était la faute au pouvoir d'achat, ou à la vie chère, au ras-le-bol du tout consommation. Bref c'était facilement prévisible. A coup de Robert Rochefort (sociologue, directeur général du Credoc) dans tous les articles pour la caution scientifique, on expliquait que cette année allait être synonyme de chute libre de la consommation par rapport aux autres années. Mais c'était sans compter sur les sournoises guirlandes électriques, les dindes et les sapins qui ne perdent plus leurs épines !

"Les français en ont marre de l'hyperconsommation"
Début Novembre, la nouvelle tombe, sous la forme d'une enquête d'opinion (miam!) réalisée par TNS Sofres, le chiffre est sans appel. Plus d'1/4 des Français sont décidés à moins consommer cette année pour Noël. Pour Robert Rochefort, c'est clair, "les Français en ont marre de l'hyperconsommation de Noël". On en parle un peu partout, sur France Inter Isabelle Giordano y consacre une brève dans son emission Service Public dans laquelle elle nous apprend, grâce à une autre enquête, que comme nos amis Américains les Français sont de plus en plus tentés d'offrir des "vouchers", ces chèques-cadeaux qui ont fleuris un peu partout. Et surtout qu'ils veulent de l'argent à Noël pour régler les dépenses courantes, et non plus des cadeaux. Moins de dépenses pour les cadeaux, les distributeurs s'étranglent...

Le bon filon cette année, c'était les guirlandes
Avant veille de Noël. Dans les gros titres du journal de France 2, nous sommes le 23 décembre au soir, le trés cher réveillon de Noël des Français, surtout si vous vous y êtes pris à la dernière minute. C'est bien connu, pressé par le temps, le consommateur de dernière minute perd toute sa rationalité et il est prêt à dépenser une fortune pour ce boa en peluche d'un vert immonde. Le chiffre tombe, les prévisions annoncent plus de 550€ de dépenses en moyenne par foyer pour Noël. Le budget "cadeau" en prend un coup par rapport à 2006, c'est vrai, mais par contre le budget "fête" explose. Le sapin qui ne perd plus ses épines (le Nordmann, mais s'il ne perd plus ses épines, est-ce toujours un vrai sapin de Noël ? Plus besoin du sac à sapin Unicef... raah), la guirlande étanche pour accrocher à la gouttière et faire enrager le voisin parce que la notre elle est plus belle d'abord, les petits santons made in Provence, tout ça explose, et finalement le chiffre de la consommation Noël n'est pas plus faible en 2007.

Mais d'où sort ce chiffre de 556€ ?
Une étude à la sortie des Ikea, Leclerc et autres Jardiland ? Que nenni, c'est le trés important cabinet Deloitte qui avait rendu public son étude internationale le 12 novembre dernier. Eh oui, c'est la même étude qui a servi début novembre à expliquer que les Français consommeront moins pour leurs cadeaux, et qui a servi hier au soir au JT de 20h pour expliquer que les Français consommaient quand même beaucoup pour Noël. De quand date alors précisément l'enquête ? Première semaine d'octobre : personnellement, le 2 octobre je ne savais pas où je passerai le réveillon, quels cadeaux je comptais faire, si mon balcon méritait vraiment sa guirlande...

C'est une petite blague : Pourquoi Dieu a-t-il créé l'économie ?
Pour que les prévisions météorologiques soient prises au sérieux.


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dimanche 23 décembre 2007

De la parité en Norvège

La Norvège n'est pas qu'un pays où l'on peut voir de belles aurores boréales, c'est également un pays où l'égalité Hommes-Femmes veut vraiment dire quelque chose. Il y a quelques mois, à l'occasion des élections législatives, j'étais revenu sur la place des femmes dans les parlements à travers l'Europe et le monde. Déjà la Norvège était très haut dans le classement. S'il reste encore une segmentation du marché du travail très marquée, le monde du travail bénéficie de lois très strictes pour assurer l'égalité hommes-femmes.

Contrairement à nous autres Français, les Norvégiens vont plus loin dans l'application de la parité. Ils dépassent la sphère du politique pour l'imposer dans la sphère économique. En effet, janvier 2008 vera une nouvelle loi entrer en vigueur entre la mer du Nord et celle de Barents, loi qui imposera à tous les conseils d'administration des entreprises côtées en bourse de comporter au minimum 40% de femmes. Il faut savoir que la Norvège détenait déjà le record du monde en matière de féminisation des CA avec une moyenne de 35% de femmes.

Ce sujet me permet de faire un peu de publicité pour un blog qui parle des sociétés nordiques et qui vaut le détour : Sociétés nordiques, par Alain Lefevre. On y apprend notamment que c'est une française qui a été récemment nommée Ministre de l'Egalité, Manuela Ramin-Osmundsen.


Crédit photo :northern lights near Berlevag, Norway 6-11-05
Originally uploaded by localsurfer

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lundi 17 décembre 2007

La fécondité à son plus haut niveau depuis plus de trente ans !

C'est la fête à l'INED ! On a fait péter le champagne, les scores n'ont jamais été aussi bon (enfin presque, c'est pas le baby boom quand même). France Prioux, démographe et directrice d'études à l'INED, signe un papier dans le dernier numéro de Population (à ne pas confondre avec Population & Sociétés, que je citais dans la précédente note, autre publication de l'Institut) dans lequel elle revient sur les principales évolutions démographiques récentes de la France.
La France métropolitaine compte 61,5 millions d'habitants au 1er janvier 2007. L'augmentation de la population a été soutenue en 2006 (+ 6,1 ‰), du fait de l'augmentation des naissances (+ 2,9 %) et de la diminution des décès (- 1,4 %). Le nombre d'étrangers admis à séjourner a très légèrement diminué en 2005. L'indicateur conjoncturel de fécondité s'élève à 1,98 enfant par femme en 2006 (+ 3,2 %).

L'indicateur conjoncturel de fécondité mesure, comme nous le précise l'INSEE, le nombre d'enfants qu'aurait une femme tout au long de sa vie, si les taux de fécondité observés à chaque âge l'année de référence demeuraient inchangés. Comme il y a toutes les raisons de penser que cette structure change chaque année, cette indicateur n'est qu'un bon outil de comparaison d'une année sur l'autre. Ce n'est pas une description de la réalité, et encore moins de l'avenir.

Malgré tout, la descendance finale diminue entre les générations 1960 et 1970, mais elle ne devrait pas descendre en dessous de 2 enfants par femme. L'estimation du nombre d'IVG a été revue légèrement à la baisse : depuis les années 1990, il se situerait un peu en dessous de 210 000, sauf en 2004 où il augmente un peu.

La descendance finale est le nombre moyen d'enfants que mettrait au monde une génération de femmes tout au long de leur vie féconde, si on ne tenait pas compte de leur mortalité. C'est la somme des taux de fécondité par âge d'une génération.

Alors que le nombre de déclarations de pacs continue à augmenter en 2006 (+ 28 %), celui des mariages a diminué de 3,3 %, la faible reprise de 2005 ne s'étant pas confirmée. La mise en application d'une nouvelle loi sur les divorces a été suivie d'une forte hausse des divorces ; l'indicateur conjoncturel grimpe à 52,3 divorces pour 100 mariages en 2005, puis recule un peu en 2006 (46,9).

La encore il faut bien comprendre ce qui se cache derrière l'indicateur conjoncturel de divortialité. Qui n'a pas entendu dans les médias ou les conversations "un mariage sur deux se terminera en divorce" ? De vraies Madame Soleil a tout les coins de rue ?! Cette interprétation est bien sur fausse. L'indicateur de divortialité c'est le nombre de divorces que compterait une "promotion" fictive de mariages dont la probabilité de divorcer serait, à chaque durée de mariage, identique à celle observée l’année considérée. En clair il ne décrit le comportement réel d’aucune promotion de mariages. Il augmente lorsque les divorces deviennent plus précoces dans les promotions de mariages, même si leur risque de divorcer ne s’élève pas. Cela ne fait pas de cet indicateur un instrument moins précieux pour autant.

L'espérance de vie à la naissance s'élève à 77,2 ans pour les hommes en 2006 (0,4 an de plus qu'en 2005) et 84,1 ans pour les femmes (+ 0,3 an). Presque toutes les pathologies ont bénéficié de progrès notables en 2004, et notamment les maladies cardiovasculaires. Grâce aux mesures de prévention, la surmortalité provoquée par la vague de chaleur de juillet 2006 a été beaucoup plus faible que prévu.

Source :
France Prioux, L'évolution démographique récente en France : la fécondité à son plus haut niveau depuis plus de trente ans, Population 2007, n°3, INED.

Crédit photo : demography par maybemaq sur Flickr

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dimanche 16 décembre 2007

Concilier travail et famille

KindergartenAprès un billet sur le supposé choix travail/loisir des français, arbitré en quelque sorte par l'appat du gain, un billet sur la conciliation travail/famille. L'INED vient de consacrer son dernier numéro de Population & Sociétés à ce sujet. Le Monde dans un article du 12 décembre en faisait un compte-rendu en se centrant sur la problématique de la garde d'enfant. Allons voir un peu plus loin...

Première info, la majorité des employeurs pensent devoir s'impliquer dans la conciliation. C'est intéressant de voir que les motivations sont, pour le privé de voir la productivité des travailleurs s'améliorer, pour le public de voir l'absentéisme diminuer, et pour les institutions sans but lucratif de voir le bien-être des salariés s'améliorer, tout simplement (ne soyons pas naïfs, les conditions de travail dans les associations et les syndicats ne sont pas des plus agréables). Il serait intéressant de savoir si la productivité augmente réellement lorsque l'entreprise investit dans la conciliation, et si hausse de la productivité il y a, est-ce qu'elle est due véritablement à l'amélioration des conditions de travail ou bien si l'aide à la conciliation est une sorte de vecteur de l'effet Hawthorne. On parle d'effet Hawthorne lorsque la productivité d'un travailleur s'améliore uniquement grace à l'attention qui est portée sur lui. Cela vient des enquêtes réalisées par Elton Mayo à la Hawthorne Works Cie de Chicago dans les années 30. Psycho-sociologue, Elton Mayo et ses étudiants investissent une usine de Chicago, et y observent les conditions de travail. Et l'étude a montré que quelles que soient les conditions de travail, le fait même que quelqu'un s'intéresse au travail des salariés suffisait à ce que la productivité de ces derniers s'en ressentent. Travaux depuis critiqués... mais qui ont fortement marqué des générations de psychologues du travail.

Les prestations en nature sont rares et existent surtout dans le public. Comprendre les entreprises préfèrent donner de l'argent à leurs salariés plutôt que de proposer elles-mêmes des services. Ainsi il y a très peu de crèches en entreprise (2% d'employeurs déclarent offrir un tel service, soit un salarié concerné sur 15 dans les entreprises de plus de 20 salariés). Ce qui est ici intéressant, c'est la contradiction entre l'étude et l'article du Monde que je citais en introduction. L'étude affirme que peu de changements ont eu lieu, même depuis la récente loi sur le sujet, et l'article du Monde, à partir du seul témoignage d'un chef d'entreprise parvient à infirmer l'étude. C'est beau. Surtout que seulement 1% des établissements ne disposant pas de crèche envisageait de proposer ce service à l'avenir.

Les prestations financières sont très disparates selon les secteurs. Ainsi dans le public l'aide aux enfants sera priviliégiée (vacances, études, frais de garde) tandis que dans le privé, c'est la contribution aux mutuelles. Et ce de manière plus prononcées dans les secteurs comme la banque, l'immobilier ou encore l'énergie.

En conclusion l'étude affirme que les mesures d'aide à la conciliation proposées par les employeurs se concentrent sur certains secteurs et se cumulent souvent, créant des disparités entre salariés.

L'enquête a été menée auprès de 2763 employeurs répondant, dans des structures d'au moins 20 salariés.

Source :
Cécile Lefèvre, Ariane Pailhé, Anne Solaz, "Comment les employeurs aident-ils leurs salariés à concilier travail et famille ?", Population et sociétés, no 440, décembre 2007.

Crédit photo : Kindergarten par Pinreader, sur Flickr

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mardi 11 décembre 2007

A propos du sondage IFOP Metro sur le "travailler plus pour gagner plus"

Ca va devenir une habitude sur ce blog, après le fameux sondage sur la grève d'octobre, voila un autre sondage qui devrait faire parler de lui. Ce matin dans le gratuit Metro, entre le titre "il a caché sa cocaïne dans sa prothèse" et "on a retrouvé le chat de Shrek 2", on peut lire que 63% des français sont prêt à effectuer un arbitrage travail/loisir en faveur du travail. Et puis dans l'article qui suit, point de précision sur l'enquête en elle-même, le chiffre était désormais considéré comme irréfutable. Et pourtant...

Et pourtant il est plus que criticable.
Tout d'abord la méthode. Nombre d'enquêtés : 1034, chiffre correct pour un sondage d'opinion. Méthode des quotas, blablabla... et mode de recueil des données : les interviews ont eu lieu par questionnaire auto administré en ligne. Qu'est ce que c'est que ça ?? Les sondeurs utilisent le net maintenant ? Et bien oui c'est pratique, ça fait de la main d'oeuvre en moins à payer, les internautes font le boulot très bien tout seul, ils ont qu'à cliquer sur des cases. Comment assurer une quelconque méthode de quotas sur le net ? Truc muche, un peu speed, remplit son questionnaire sur je ne sais quel site, squizze la question qui lui demande sa ville, et hop c'est foutu. La méthode des quotas reposant sur une stratification régionale et par type d'agglomération, les résultats sont biaisés. Bref, je vous laisse juge de l'utilisation d'une telle méthode pour recueillir des données fiables.

Je passe sur les fautes d'orthographe que l'on peut trouver dans le rapport du sondage, à croire que c'est un stagiaire de 3eme qui fait sa Découverte Professionnelle à l'Ifop qui l'a rédigé (et encore, c'est méchant pour l'élève de 3ème).

La question, la question, la question...
Le coup classique de la question qui induit la réponse. Je vous le donne en mille :
Vous personnellement, si vous en aviez le choix, que préfereriez vous ?
- Gagner moins d'argent et avoir plus de temps libre
- Gagner plus d'argent et avoir moins de temps libre


Vous là, oui vous, derrière votre écran... On bouge plus on répond à la question !
Sans réfléchir, qu'est ce qui sonne le mieux dans vos oreilles : gagner moins ou gagner plus ?
On se demande bien pourquoi la question n'est pas formulé de façon plus neutre :
- Gagner plus d'argent et avoir moins de temps libre
- Avoir plus de temps libre et gagner moins d'argent

Voire carrément dans l'autre sens :
- Gagner plus d'argent et consacrer moins de temps à sa famille
- Gagner moins d'argent et consacrer plus de temps à sa famille

Bref, quelques petits exemples pour vous montrer qu'une question n'est jamais neutre.

Une escroquerie pouvant tout à fait en cacher une autre, on présente des chiffres qui ne font pas état de la fameuse catégorie "Ne se prononce pas". Celle qui embête les journalistes mais qui passionnent les sociologues. Forcément, sur Internet, ce sont ceux qui veulent donner leur avis qui le donnent, ceux qui ne se prononcent pas n'ont pas cliqué sur le lien. Et comble, on ose comparer les résultats avec une enquête de 2001 pour en tirer un semblant d'étude longitudinale. En 2001, 1) l'enquête était réalisée par téléphone, 2) et nul part l'IFOP ne fait mention de la question qui était posée aux enquêtés. Résultats, on a un taux de non réponse de 6% qui suffit pour servir de variable d'ajustement et ne pas dégager de majorité en 2001. Le 47% de 2001 permet à Metro et à l'IFOP de titrer "Il y a eu un vrai basculement en 2001" : ou comment on fait croire que la société bouge dans un sens sans avoir la certitude que ce n'est pas l'inverse.

Deuxième question, encore plus énorme :
Le gouvernement a annoncé des mesures sur l'exonération de charges sociales et la defiscalisation des heures supplémentaires. Souhaitez vous à l'avenir effectuer des heures supplémentaires ?

Pourquoi ne pas avoir plutôt demandé :
Le gouvernement a annoncé que les heures supplémentaires ne rentreront plus dans le calcul de la retraite et de l'assurance chômage. Souhaitez vous à l'avenir effectuer des heures supplémentaires ?

Les deux questions sont équivalentes. Mais les réponses induites loin d'être indentiques. Et l'enquête continue, mais moi je m'arrête...

NB : le nom du PDF publié par l'IFOP c'est travaillerpluspourgagnerplus.pdf , si vous aviez encore des doutes...

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L'argent ne fait pas le bonheur...

...mais il y contribue. Le CREDOC (Centre de Recherche pour l'Etude et l'Observation des Conditions de vie) dévoile quelques conclusions d'une étude à paraître prochainement, qui montre qu'en matière de conditions de vie les hauts revenus se détachent globalement des autres catégories de la population depuis 25 ans. Et dans le même temps les classes moyennes "dérivent" - selon l'expression consacrée par Louis Chauvel - de plus en plus vers les bas revenus.

Pour observer des courbes très intéressantes, c'est par ici.

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lundi 10 décembre 2007

Kesako la balance commerciale ?

J'ai entendu ces jours-ci sur les ondes d'une radio d'information en continu une journaliste déplorer le déficit commercial de la France qui se creuse. Ce matin dans une tribune qui a fait grand bruit, la secrétaire d'Etat aux Droits de l'homme Rama Yade, a déclaré, entre autre, que "la France n'est pas qu'une balance commerciale". Mais qu'est ce donc que cette fameuse balance commerciale ? Et le fait qu'elle soit déficitaire est-il en soi si préoccupant ?

Un outil statistique
Comme tout outil statistique, la balance commerciale est une construction. Elle a donc ses qualités et ses défauts. Plus précisément la balance commerciale mesure les échanges de biens - et uniquement les échanges de biens - entre la France et le reste du monde. En clair, on additionne toutes les exportations de biens, et on retranche toutes les importations de biens, ça donne le solde de la balance. Dans sa définition française (et contrairement à d'autres pays), elle ne mesure pas les échanges de services, permière précision. Deuxième précision, "entre la France et le reste du monde", cela signifie entre les agents économiques qui ont un centre d'intérêt en France et ceux dont les centres d'intérêts sont extra-territoriaux. C'est donc le critère de la résidence des agents économiques qui est pris en considération, et non le critère de nationalité. Concrètement, si une entreprise française basée à l'étranger produit des biens qu'elle écoule en France, ils seront comptabilisés parmi les importations. Et inversement, une entreprise étrangère basée en région parisienne qui envoit ses biens aux quatre coins de la planète alimente les exportations prises en compte dans la balance commerciale française.

Le déficit est-il forcément mauvais ?
Contrairement à ce que l'on peut penser, le déficit commercial n'est pas fatalement une mauvaise chose. Le sens commun ("le bon sens") nous amène à penser que d'un échange il vaut mieux sortir excédentaire que déficitaire. Pourtant si l'on y réfléchit un peu, l'explication est bien moins évidente.

En effet, un déficit signifie que l'on importe plus que l'on exporte. Le fait d'importer beaucoup de biens peut être le signe d'une demande intérieure dynamique, qui peut également être renforcée par une croissance mondiale faible, qui limite ainsi les exportations. Rappelons que les exportations répondent à la demande du reste du monde. Un déficit peut donc s'avérer être le signe une vitalité économique importante à l'intérieur des frontières du pays déficitaire. A l'inverse, un excédent (lorsque les exportations sont plus importantes que les importations) peut être provoqué par une récession qui comprimerait la demande intérieure.

L'économiste Jacques Généreux exprime un point de vue intéressant, puisque selon lui s'il on considère que "la richesse progresse là où la population dispose d'une plus grande quantité de biens et de services vraiment utiles (alors) l'excédent commercial a plutôt les apparences d'un appauvrissement puisqu'il implique une sortie nette de biens vers l'étranger". La Chine a beau avoir un excédent commercial record, les chinois en bénéficient-ils pour autant ? Inversement, les Etats-Unis enregistrent des déficits abyssaux, les américains sont-ils moins biens lotis que les chinois ?

Comparer les balances commerciales des pays n'a donc pas grand sens si on ne les rapportent pas au Produit Intérieur Brut des pays en questions. Et déplorer le déficit commercial ou féliciter l'excédent n'a pas plus de sens si on ne fournit pas quelques éléments d'explications.

Sur le cas de la France et de l'Allemagne.
On compare souvent les récents déficits français aux récents excédents allemands. Les deux soeurs de l'Europe ne se ressemblent pas tant que ça au final. La France est fortement tertiarisée, spécialisée dans les services (hotellerie, restauration, secteur du tourisme) qui 1) ne sont pas comptabilisés dans la balance commerciale, et 2) ne sont que très difficilement exportables, vous en conviendrez. Au contraire, l'Allemagne est un gros producteur de biens d'équipement professionnel, qui s'exportent très bien et pèsent lourd dans la balance (c'est le cas de le dire). Et ce d'autant plus que des réformes structurelles ont permis de faire baisser les coûts de la main d'oeuvre outre-rhin depuis plusieurs années. L'industrie allemande a donc gagné en compétitivité sur le plan international, mais au prix d'une compression de la demande intérieure due à la stagnation des salaires. Le fameux pouvoir d'achat est en berne chez les allemands, et l'excédent commercial est renforcé par des importations faibles et une croissance faible. Alors qu'en France, la consommation est toujours le moteur de la croissance. Alors, bon ou mauvais excédent ?

Crédit photo : Spinning scales par darrjo23

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jeudi 6 décembre 2007

Le sexe des étudiants

On a parlé récemment des étudiants des universités qui se sont mobilisés (ou pas) contre la récente loi relative à l'autonomie des universités. On en a parlé même beaucoup, parfois en bien, souvent en mal, mais qui sont-ils vraiment, ces étudiants de 2007 ? On m'a demandé tout récemment dans une discussion pourquoi "y a que des filles en lettres et que des garçons en sciences économiques ?". La réalité statistique est plus nuancée que cela, même s'il est vrai que certaine filière sont toujours fortement féminisées alors que d'autres le sont beaucoup moins. Alors voila quelques petites précisions sur la composition des filières.

Alors que des filles en lettres ? Presque... Selon les chiffres de la Direction des Etudes et de la Prospective (et de la Performance, mais ce dernier P est récent) elles seraient entre 70% et 75% selon les filières (Lettres, Langues, Sciences humaines et sciences sociales). Mais cela nous donne tout de même près d'une étudiante sur quatre qui est en réalité un étudiant, ce qui n'est pas négligeable.

Que des mecs en éco-droit ? Que nenni. Plus de 51% de filles en Economie, plus de 59% en AES (Administration Economique et Sociale), et près de 65% en Droit et sciences politiques. Par contre il est vrai que les filles sont minoritaires du côté des sciences dites "dures". C'est vrai en Maths-Physique-Chimie (31%) mais pas en sciences naturelles (biologie géologie). Autre filière où les filles sont encore minoritaires, STAPS (Sc. et techniques des activités physiques et sportives) avec un taux de féminisation de la filière à 41%.

Mais le plus intéressant est peut-être de différencier les niveaux de ces différents cursus universitaires. Entre le niveau Licence (Bac+3), Master (Bac+5) et Doctorat (Bac+8) il y a de fortes disparités. Les femmes s'évaporent au fur et à mesure qu'elles avancent dans leurs études. Plusieurs causes à cela. Si le nombre de femmes dans les études supérieures ne cessent de croitre, il est normal qu'il y en ait relativement plus dans les premières années, en espérant qu'au fil des années elles viennent grossir les rangs des niveaux supérieurs. Mais je ne crois pas trop à cet effet. Je penche plutôt pour un effet d'autosélection des femmes, renforcé par une anticipation de la "carrière familiale" encore très présente dans les mentalités. Les filières étant toutes sélectives à partir du Master 2 (et une bonne partie avant), on peut imaginer une discrimination : à niveau de diplôme égal, à âge égal, un candidat masculin serait préféré à une candidate.

Probablement existe-t-il des enquêtes qui pourraient permettre d'approfondir cette question de l'évaporation féminine dans les études supérieures, notamment du côté de l'OVE (et si vous avez des références, n'hésitez pas à les poster dans les commentaires). Le droit est une discipline particulièrement éloquente sur cette question : quand les étudiants en Master sont pour les 2/3 des étudiantes, il n'en reste "plus que" 48% en doctorat.

Il n'en reste pas moins que les filles restent majoritaires dans le système universitaire français (56%) alors que, contrairement aux idées reçues, il n'y a pas plus de filles que de garçons dans la classe d'âge concernée. Il nait en France, 51 garçons pour 49 filles. Mais si elles sont depuis près de quarante ans plus nombreuses à avoir le bac que les garçons, elles sont 57,4% en cursus Licence, 56,4% en cursus Master, plus que 46,9% en Doctorat, 40% parmi les Maîtres de Conférence, 17,9% parmi les Professeurs d'Université, et moins de 10% parmi les Présidents d'Université... Cela fait réfléchir.

Source :
Repères et références statistiques 2007, "Les étudiants", pp 182-183, DEPP.
"Carrières scientifiques et universitaires : à quand l'égalité Hommes/Femmes", Actes du coloque, 15 octobre 2003, Paris.

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mercredi 5 décembre 2007

Ne soyons pas simplistes

Aux visiteurs qui ne passeraient pas leur temps sur les blogs qui parlent d'économie, je conseille toutfois la lecture chez RCE de ce post très intéressant sur la question du pouvoir d'achat.
Mais encore plus intéressant, ce commentaire pétri de "bon sens" et posté par un courageux anonyme, et cette réponse magistrale , titrée "J'éclaire le débat public et c'est ma joie" (j'adore !).

Régalez-vous !

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mardi 27 novembre 2007

Rapport Olivennes, à la benne !

Le titre est un peu racolleur, il est vrai. Mais que voulez vous ? Le rapport Olivennes - du nom du PéDéGé de la Fnac - sur le piratage sur internet provoque un tollé, et pas seulement chez les associations de consommateurs et d'utilisateurs du Web. Les économistes bloggers ont laché les chiens sur le texte qui plaisait tant à Patrick Bruel et ses amis. Pour y voir un peu plus clair, j'ai recensé une bonne partie des notes qui en parlent :

@ Regards croisés sur l'économie : De Rackham le Rouge à Loïc, 11 ans
@ Notes d'un économiste : Le rapport de la mission Olivennes
@ L'éconoclaste : Le plus vif d'entre nous

Moins économique, mais non moins expert, le très bon Ratiatum :
Le rapport décrypté point par point

Et toujours sur Ratiatum, le très croustillant :
Petits mensonges de Denis Olivennes

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lundi 26 novembre 2007

et ils pompaient...

Un peu d'humour dans ce monde de brutes... Vous l'avez peut-être déjà reçu dans vos boites mails, mais je ne résiste pas à l'envie de le partager. Monsieur Olivennes, je suis désolé mais je n'ai pas trouvé qui était l'auteur de ce très bon document. Je ne peux donc pas le retribuer.

Cliquez pour agrandir les images



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mercredi 21 novembre 2007

Du luddisme à la SNCF ?

Ce matin l'info en tête de gondole c'était le "sabotage coordonné" de lignes grande vitesse aux quatre coins de la France (ou plus précisément de l'étoile ferroviaire). Comme un non dit, le doute planait : était-ce des cheminots qui avaient volontairement dégradé leur propre outil de travail (encore que les infrastructures ferroviaires sont entretenues par Réseau Férré de France, mais on ne va pas rentrer dans les détails) ? La dégradation de l'outil de travail, le luddisme, n'est pourtant pas dans la culture ouvrière française, et encore moins dans la culture cheminotte, très attachée aux machines et aux voies. D'ailleurs le mot "Cheminot" qui apparait dans la deuxième moitié du XIXè siècle désignait précisément ceux qui construisaient et entretenaient les voies, les chemins de fer. Et aujoud'hui le terme désigne tout employé de la SNCF, roulants comme sédentaires. Petite histoire du luddisme, et retour sur la notion de sabotage...

Du sabotage...
Il est assez curieux que la direction de la SNCF ait employée le terme de "sabotage" pour décrire les exactions commises cette nuit. Historiquement le saboteur était un employé des chemins de fer qui, dans les gares de triage, posait des sabots de bois sur les voies pour ralentir le mouvement des wagons lorsqu'ils n'étaient pas accrochés à une loco. Toujours dans l'histoire des chemins de fer, l'action de sabotage (au sens où on l'entend aujourd'hui) consistait pour les cheminots résistants à l'occupant pendant la seconde guerre mondiale, à dégrader les infrastructures ferroviaires de manière à empêcher la déportation de juifs, à retarder le ravitaillement des occupants, etc. Cf la photo qui illustre le billet. A l'heure où Nicolas Sarkozy met en avant le courage du jeune résistant communiste Guy Môcquet, il est curieux qu'un terme qui, de plus, trouve une connotation positive dans l'histoire des chemins de fer se retrouve utilisé pour qualifer les dégradations. Les "casseurs" assimilés à des "héros résistants", seraient opposés à la réforme des régime spéciaux, donc en résistance contre le gouvernement ? L'emploi du terme à rajouté à la suspicion. Mais il faut bien reconnaître qu'il n'existe pas énormément de synonymes, donc de solutions alternatives pour les nommer.

... au luddisme.
Casser son outil de travail, cela porte un nom, c'est le luddisme. Tiré du nom de Ned Ludd, ouvrier du textile en Grande Bretagne en pleine révolution industrielle, qui aurait détruit des métiers à tisser, les machines étant accusées de détruire des emplois. On retrouve ici la peur du machinisme et plus globablement des innovations technologiques, idée que Joseph Alois Schumpeter a combattu en affirmant que le processus d'innovation consistait en une destruction-créatrice (ou création-destructrice mais c'est un autre débat). Les destructions d'emplois sont compensées par des créations nouvelles liées précisément aux nouvelles technologies, en amont comme en aval de celles-ci (il faut des gens pour les construire, les faire fonctionner, les entretenir, et pour assurer des débouchés nouveaux offerts par l'arrivée de ces machines). Mais le luddisme n'est guère employé en France, si ce n'est la révolte des canuts à Lyon en 1831, lorsque les tisseurs font arrêter les métiers à tissers parfois par la force.

Détruire l'outil de travail est un moyen d'action exceptionnel, qui est utilisé lorsque la négociation est totalement bloquée, et que les autres moyens de contestation ont tous été utilisés (souvenez-vous les salariés de Cellatex menaçant de faire exploser leur usine de produits chimiques et d'entraîner ainsi la pollution extrême d'une rivière dans les Ardennes). Or le round de négociations ne fait que commencer à la SNCF. On peut alors se demander à qui profite le crime... et rappeler que pour l'instant, rien ne prouve que ce sont des cheminots qui ont saccagé les LGV.

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mardi 20 novembre 2007

petite réaction à chaud à propos de Cdanslair

Un billet au ton un peu plus personnel qu'à l'habitude mais bon... J'aime bien l'émission Cdanslair sur France 5. Je trouve le concept plutôt sympathique, les intervenants souvent intéressants, l'animateur assez pro quoiqu'il fait souvent venir les mêmes. Et ce soir, ça n'a pas loupé, on parlait des fonctionnaires, il a donc invité Jacques Marseille. David Martinon n'a qu'à bien se tenir, on lui dispute la place de porte-parole de Nicolas Sarkozy. Bref j'ai trouvé l'émission de ce soir décevante, parce que déséquilibrée, et je le fais savoir par voie de blog.

Jacques Marseille, historien et économiste. J'ai pour habitude de vanter les mérites de l'interdisciplinarité, mais là j'ai quand même l'impression que je tiens mon exception qui confirme la règle. A vouloir faire deux choses en même temps, il en réussit aucune. Et Jacques Marseille c'est de pire en pire. Vous me direz, quand y a Marseille sur le plateau, y a pas Elie Cohen. C'est vrai qu'en terme de coût d'opportunité on y gagne, mieux vaut avoir un Marseille en mauvaise forme, qu'un Cohen qui aboie à tout bout de champ sur tout ce qui est de l'autre côté du clivage droite-gauche par rapport à lui.

Enfin bon bref, il se fait tard et je m'emporte. Tachons de retrouver le fil de l'histoire. Sur le plateau on retrouvait un autre habitué, Dominique Reynié. Souvent placé à gauche de l'écran (Marseille est toujours à droite, mais bizarrement Cohen se balade en fonction de l'émission), D. Reynié n'a pas toujours été dans la défense des fonctionnaires, le sujet du jour.

Et puis il y avait deux nouveaux : le patron de L'Etudiant, "publication incontournable de la vie étudiante" dixit Y. Calvi, qui vit des marroniers nombreux dans le PUF (le Paysage Universitaire Français), mais qui est le plus souvent déconnecté des réalités des campus universitaires (L'Etudiant aime bien mettre en avant les Grandes Ecoles qui payent les espaces de pub... comment ça je sors ?) : à la fin de l'émission, il hurle que le grand chantier c'est le statut social de l'étudiant (c'est vrai, mais c'est démagogique de sa part) et qu'en plus ça couterait rien (sic).

Le deuxième nouveau était une nouvelle : 20% de femmes sur le plateau au milieu de 80% d'hommes, vive la parité. En plus elle était la caution "jeune et jolie" instrumentalisée "by herself" (total respect, s'instrumentaliser soi même, c'est toujours très fort). En effet, elle a cru bon de rappeler que, elle, elle faisait partie des jeun's, de la génération 30-40, celle qui bouge, les forces vives, tout ça, enfin celle qui a voté majoritairement N. Sarkozy aux dernières élections avec les plus de 65 ans. Un jour il faudra dire que la majorité des électeurs de N. Sarkozy, les plus de 65 ans, sont aussi ceux qui ne sont plus du tout concernés par l'avenir du système de retraite, mais on va pas déclencher une guerre inter-générationnelle, c'est pas bien. Cette jeune femme est présentée comme une responsable de l'iFRAP, Institut Français de Recherche sur les Administrations Publiques, "un organisme qui travaille sur les politiques publiques". Ca veut tout dire et rien dire. Mais bon, je me dis que ça doit être un labo de recherche en science politique, genre un concurrent du CRAPE, puisque ça sonne pareil.

En fait non. L'IFRAP, je m'en rends compte en faisant une recherche sur le net, c'est un think tank de droite, plutôt "obscur et sombre" comme dirait les inconnus, avec un site internet qui fait peur. Pour planter le décor, le fondateur de ce groupe a rédigé deux livres annoncés comme rien de moins que des "best sellers" : Les profiteurs de l'Etat, et La dictature des syndicats. Bref, des best sellers inconnus quoi. En plus ils sont proches de Liberté Chérie (droite extrême) et appelle à manifester dans toutes les manifs anti-grèves. Bravo Yves Calvi pour la présentation tout à fait impartiale des invités.

Bref, il n'y avait pas grand monde pour sauver le fonctionnaire gréviste (donc non payé, je tiens à le rappeler). Et Jacques Marseille, ma bête noire, y a été de son lot d'imprécisions, de carricatures, de manipulations des mots dont il est très friand. En vrac :
"les fonctionnaires de catégorie A se recrute à Bac+5", raté les concours sont ouverts à niveau Bac+3 sinon tous les profs auraient des Master... ça se saurait.
"il y a des fonctionnaires de catégorie D"... Lui qui veut que la France regarde vers l'avant et accepte la réforme, il semble avoir oublié que les catégores D ont été supprimées en... 1988 ! Eh oui, 20 ans, ça passe vite.
"Les fonctionnaires cotisent 7,85% de leur traitement pour leur retraite, beaucoup moins que dans le privé", mais il ne précise pas que les cheminots cotisent 36% de leurs salaires bruts, beaucoup plus que dans le privé. Mais ça, on le dit pas.
"Le progrès de l'espérance de vie est colossal, on vit 25 à 30 ans après son départ en retraite"... 60+30 = 90. Espérance de vie à 90 ans, c'est pas mal, sauf que la moyenne française plafonne à 79 ans, et que le Japon est en tête à 82. On oublie aussi souvent de dire que les ouvriers ont cotisé pendant longtemps sans en profiter : leur espérance de vie était inférieur à l'age de départ à la retraite jusque dans les années 70, les ouvriers cotisaient pour leurs patrons.
"la greve des fonctionnaires coute des centaines de millions"... mais personne ne déduit les économies que représentent les traitements non versés (les grévistes ne sont pas payés, je le répète). Avec un salaire brut moyen dans la fonction publique d'Etat à 2540€ (a titre de comparaison, 2513€ dans le privé, mais les agents de l'Etat sont sensiblement plus diplômés que les salariés du privé, donc au final les agents du public sont moins bien payés), un jour de grève représente une économie de 85€, soit près de 130 millions rapportés au nombre de gréviste.

Mais rendons à Cesar... J. Marseille ne s'est pas trompé lorsqu'il s'est agit de compter les syndicalistes en France. Ils sont 1 880 000, soit près de 9% de la population salariée. Après une baisse continue des effectifs, ces derniers semblent stagner voire progresser légèrement. Mais rien ne vaut une petite lecture personnelle de ce dossier de la DARES.

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lundi 19 novembre 2007

Grèves, conflictualité, etc...

Deux articles qui valent la peine d'être lus, parus dans Libération ces jours-ci :

"La conflictualité ne décline pas, elle se transforme", une interview de Jean-Michel Denis, sociologue (Libération du 19 novembre)

"Le mythe d'un pays gréviste", une tribune de François Doutriaux, juriste (Libération du 14 novembre)

[EDIT]
Pour un autre point de vue, un billet publié sur le blog Ecopublix.eu
Des grèves partout, sauf dans les statistiques

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jeudi 15 novembre 2007

Socle commun et justice sociale

Dans le dernier numéro de l'Enseignant, la revue du Syndicat des enseignants-Unsa, on trouve une interview de François Dubet, sociologue de l'éducation. Il s'exprime sur la question du socle commun de connaissances et de compétences. Kezako le socle ? Je sors de 6 heures de formation sur ce thème, et j'y vois relativement plus clair. Quoique...
Prof de lycée, je ne devrai pas être amené à "pratiquer" ce socle puisque c'est le brevet des collèges qui valide la maîtrise des sept "piliers" qui composent le socle. Pour autant (et au risque de faire une belle lapalissade) on ne peut pas enseigner à des lycéens s'ils ne sont pas passés par le collège. Entendez par là qu'un prof de lycée fera mieux son travail si les élèves qu'il reçoit en début de seconde ont les pré-requis nécessaire à la scolarité dans ce que l'on appelle le cycle de détermination (seconde) et le cycle terminal (première et terminale). Alors c'est quoi le socle et qu'est ce qu'en pense François Dubet ?

Le socle fait partie de la loi Fillon de 2005
Le socle commun de connaissances et de compétences est défini par la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'École du 23 avril 2005 plus connue sous le nom de loi Fillon. Souvenez-vous, les manifs lycéennes, parfois violentes, soulevant une polémique intellectuelle, etc... C'était autour de cette loi qui contient, en outre du socle, le retour des bourses au mérite, la suppression des Travaux Pratiques Encadrés en Terminale, la suppresion du deuxième enseignement de détermination en classe de seconde, le non remplacement des enseignants pour des absences de moins de deux semaines. Le printemps 2005 est également marqué par le référendum sur Traité Européen, et le NON massif des français entraine le limogeage de François Fillon et l'abandon de certaines mesures de la loi par son successeur.

Les 7 piliers et 3 paliers
Le socle est donc devenu la référence en matière de rédaction des programmes et il repose sur sept piliers :
* la maîtrise de la langue française ;
* la pratique d'une langue vivante étrangère ;
* les principaux éléments de mathématiques et la culture scientifique et technologique ;
* la maîtrise des techniques usuelles de l'information et de la communication ;
* la culture humaniste ;
* les compétences sociales et civiques
* l'autonomie et l'esprit d'initiative.

Vaste programme, un peu fourre-tout quand on y regarde de plus près, dans lequel on trouve "Savoir nager" dans le septième pilier, à côté de "développer sa volonté de se prendre en charge personnellement" et "prendre conscience de l'influence des autres sur ses valeurs et ses choix". C'est une sorte de résultat de brainstorming organisé afin de définir le profil du collègien modèle en fin de 3ème. La barre est haute, et la multitude des exigeances prouve à ceux qui pensent encore que "le niveau baisse" que les élèves du XXIème siècle ont un niveau supposé de gestion et de compréhension de la complexité du réel bien plus élevé que leurs parents (et a fortiori leurs grands-parents) au même âge.

L'évolution de la maîtrise des compétences et connaissances est évalué à trois moments distincts de la scolarité :

* le premier, en fin de C.E.1, correspond notamment à l'acquisition de la lecture courante et de l'écriture ;
* le deuxième, au terme de l'école primaire, mesure en particulier l'acquisition des règles fondamentales de la grammaire, du calcul élémentaire et des quatre opérations ;
* enfin, le brevet des collèges atteste de la maîtrise des sept compétences du socle.

Un livret personnel permet à l'élève, à sa famille et aux enseignants de suivre l'acquisition progressive des compétences : il est expérimenté au cours de l'année scolaire 2007-2008. Déjà les livrets expérimentaux proposent quatre paliers, avec une évaluation en fin de 6e.

Justice sociale et lien social
François Dubet, dans l'interview que je mentionnais en introduction de cette note, met en avant deux raisons qui l'amènent à défendre le principe du socle commun. Tout d'abord le "socle" est pour lui un moyen de garantir une justice sociale, au sens de Rawls (pour faire rapide dans le modèle "Rawlsien", les inégalités sont justes et légitimes si elles ne réduisent pas la liberté des individus, ni l’égal accès aux positions sociales, et si elles profitent aussi aux plus défavorisés). Pour Dubet "la question fondamentale est de savoir quelles sont les compétences que les plus faibles ont pu acquérir. C’est beaucoup plus difficile d’obtenir une masse d’élèves maîtri­sant les compétences essentielles que de dégager une minorité de très bons élèves. En France, on accepte l’idée d’un salaire minimum, d’un niveau de santé élémentaire, de conditions élémentaires de logement... Étrangement, c’est un raisonnement qui ne passe pas facilement dans le monde scolaire, beaucoup trop méritocratique". Le socle garantirait donc l'égale maîtrise de compétences de base, allant ainsi vers plus de justice sociale.

Après avoir insisté sur le "socle" il trouve une deuxième raison de légitimer celui-ci à travers son qualificatif "commun". Dans une société éclatée culturellement et socialement, garantir des bases communes serait un gage d'unité sociale, une source de lien social : "Aujourd’hui, nous avons des programmes d’enseignement ambitieux. La plupart des élèves ne peuvent pas les atteindre. On leur propose donc de faire du soutien scolaire pour qu’ils rattrapent le train qu’ils n’ont pas pris. En général, ils le rattrapent assez peu. Moi je pense qu’il faudrait faire le contraire. On doit s’assurer que tous montent dans le train, ce qui ne doit nullement empêcher certains d’aller plus loin et plus vite. Mais cela ne va pas être aux dépens de ce que tous les élèves savent faire".

J'aimerais être aussi confiant que François Dubet quand à l'efficacité d'un tel socle. Mais j'ai encore quelques doutes. L'avenir nous le dira. Les programmes du collège vont être mis en conformité avec le socle progressivement. Déjà quelques élements sont mis en place pour l'année 2007-2008 tel que le Brevet Informatique et Internet (B2i) qui devient obligatoire en vue de l'obtention du Brevet des collèges.

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mercredi 14 novembre 2007

Le Contrat Nouvelle Embauche (CNE) est mort

Le CNE a vécu, il est mort. L'Organisation International du Travail l'a recalé car il ne respectait pas les deux principes fondamentaux du droit du travail que sont :
1. Le caractère raisonnable de la période d'essai
2. La motivation de tout licenciement

Je rappelle que le CNE était destiné aux entreprises de moins de 20 salariés. Il permettait à l'employeur de rompre le contrat de travail de manière unilatérale et sans motivation durant une période dite "de consolidation" de deux années qui suit la signature du contrat.

Voila la dépêche de l'AFP qui rend compte de l'avis de l'OIT réunie ce mercredi à Genève :

La France se pliera à l'avis de l'Organisation internationale du travail (OIT) condamnant le Contrat nouvelles embauches (CNE) mais réclame un "espace" pour négocier la flexibilisation du marché du travail, a déclaré mercredi le délégué de la France, M. Gilles de Robien.

Le gouvernement français "veillera à ce que les recommandations (de l'OIT) soient prises en compte", a annoncé M. de Robien devant le Conseil d'administration de l'OIT, réuni à Genève.

"Nous souhaitons que l'interprétation des conventions ratifiées (de l'OIT) laisse au gouvernement et aux partenaires sociaux un espace pour dynamiser la création d'emplois", a ajouté le représentant de Paris auprès de l'OIT.

La France est "engagée par les orientations dites de flexi-sécurité qui sont promues au niveau de l'Union européenne", a encore fait valoir M. de Robien.

"Le développement de l'emploi et la recherche de politiques actives du marché du travail qui combinent, d'une part, une plus grande flexibilité pour faire face au défi de la compétitivité que nous impose la mondialisation et, d'autre part, une véritable sécurisation des parcours professionnels des travailleurs, sont actuellement en France au coeur des négociations entre les partenaires sociaux", a souligné le représentant de la France.

L'OIT a "laissé une porte ouverte", a estimé un diplomate français en soulignant que l'organisation "n'exclut pas la possibilité que se justifie une période plus longue" que six mois de période d'essai.

Le patronat et les syndicats français ont engagé en septembre dernier des négociations particulièrement intenses.

Le patronat souhaite obtenir des assouplissements au contrat de travail, qui passeraient notamment par un allongement de la période d'essai et la possibilité pour un employeur de se séparer à l'"amiable" d'un salarié. La période d'essai proposée pourrait atteindre six mois, voire un an pour les cadres.

Le CNE, en vigueur en France depuis août 2005, a été recalé mercredi par l'Organisation internationale du travail (OIT) qui a estimé qu'une période d'essai de deux ans n'est pas "raisonnable".

En outre, un contrat de travail ne peut être rompu "en l'absence d'un motif valable", a tranché l'organisation.

Créé en août 2005 malgré l'opposition des syndicats, le CNE est un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) destiné aux entreprises de moins de 20 salariés. Il débute par une période de deux ans, dite "période de consolidation" pendant laquelle l'employeur peut licencier son salarié sans avoir à fournir de justification. Il a été beaucoup utilisé par des employeurs du bâtiment.

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Du bon usage des mots en temps de grèves

On oublie souvent le pouvoir des mots. En ces temps de mouvements sociaux, il est toujours bon de relire cet article paru sur Acrimed en 2003, plus que jamais d'actualité.

>>> Lexique pour temps de grèves et de manifestations


Toujours à propos des grèves, il y a quelques mois je publiais deux notes sur le droit de grève et le service minimum que l'on peut toujours lire ici et .

Pour relire ma note sur la valeur des sondages d'opinion, c'est par ici.

A noter également la création par la SNCF d'une page spécialement dédiée aux divers Powerpoint et documents qui circulent dans vos boites mails pour dénigrer l'entreprise et ses salariés : halte aux idées reçues. J'avais d'ailleurs relayé un article paru dans Libération (et qui ne doit plus être librement accessible à présent) mais que vous pouvez relire ici sur la pénibilité du travail de cheminot.

Plus que jamais, il est impératif d'exercer votre esprit critique à l'égard des raccourcis journalistiques et des élans de "bon sens" tellement tentant et courant ces jours-ci.

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mardi 13 novembre 2007

Mesdames, messieurs... Les chiffres du chômage !

Version modifiée du 13 novembre

Retenez votre souffle, ils sont sortis. On en a parlé pendant la campagne présidentielles. Les voila. Mesdames, messieurs, roulement de tambour... TaDam ! Les chiffres "officiels" du chômage en 2006. En presque exclusivité, et avant le journal de 20h00.

C'est dans le dernier numéro d'INSEE Première que vous trouverez les explications que l'on attendait depuis des mois : les fameux résultats de l'enquête emploi qui paraissent habituellement au printemps, et qu'on a bizarement servis à l'automne cette année... Au détour d'une note sur l'évolution du chômage depuis le début 2006, on apprend le résultat de cette fameuse Enquête Emploi que l'INSEE et la Dares n'avait pas été en mesure de communiquer en avril dernier. Tout ça pour apprendre que :
En moyenne pour l’année 2006, comme en 2005 et en 2004, il s’établit à 8,8 % de la population active pour la France métropolitaine, soit 2,4 millions de personnes.
Bref ça ne bouge pas des masses depuis trois ans, quoi qu'en fasse les gouvernements... de droite (hop, voila, ça y est c'est dit... Mais la mauvaise foi a des limites : les statistiques sont souvent trompeuses). Avant de partir, n'oubliez pas de jeter un oeil au communiqué de presse d'ACDC (les Autres Chiffres Du Chômage) histoire de confronter les points de vue !

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jeudi 8 novembre 2007

Les pauvres, la santé et les franchises médicales

Olivier Bouba-Olga revient sur son blog sur le bulletin INSEE Première n°1162 consacré à une étude qui différencie régions riches et régions pauvres. Je vous incite à lire ce Insee Première ainsi que la petite note d’OBO forte intéressante, avec des petits calculs qui en disent long.

Mais ces jours-ci mon attention a plutôt été retenue par le numéro précédent d’INSEE Première, le n°1161 consacré à la santé des pauvres. Dans cette note la pauvreté est entendue dans sa définition européenne, c'est-à-dire qu’est considérée comme personne à bas revenu toute personne dont les revenus ne dépassent pas 60% du niveau de vie médian. Avec toutes les imperfections qui caractérisent ce genre de définition : quid de celui qui est à 60,01 %

A l’heure où le débat sur l’instauration des franchises médicales est encore vif en France – bien que le texte ait été voté à l’assemblée le 6 novembre, pour une mise en place dès le 1er janvier 2008 – la lecture de cette note de l'INSEE est plus qu’intéressante.

Pas de progressivité

En effet, contrairement aux autres pays d’Europe où elle est instaurée, la franchise médicale à la française ne prévoit aucune progressivité. Que votre salaire soit nul, que vous soyez pris en charge par la Couverture Maladie Universelle, ou bien que vous vous appeliez Arnaud Lagardère, vous paierez la même franchise médicale. Or toutes études de sociologie de la santé montrent que les pauvres se soignent moins bien que les riches. Par méconnaissance du système (et notamment des rôles des différents spécialistes), par un rapport au corps et à la médecine différent de ceux des classes plus aisées de la population (on va chez les médecins quand on va vraiment mal… c’est-à-dire souvent trop tard), les pauvres ont un taux de morbidité (probabilité de tomber malade) et un taux de mortalité (pas besoin d’expliquer) bien supérieur aux classes favorisées. Il y a donc fort à parier que les franchises médicales ne vont pas améliorer la situation pour cette population, en l’éloignant encore un peu plus le domaine de la santé.

La santé des pauvres
L’étude de l’INSEE met en avant plusieurs points qui viennent confirmer ce que les autres études ont déjà surligné par le passé. En clair, les pauvres consultent moins les médecins, et particulièrement les spécialistes ; ils se déclarent plus souvent en mauvaise santé que le reste de la population ; dans la suite du premier élément, les problèmes dentaires sont surreprésentés ; les enfants pauvres subissent tout autant que leurs parents, si ce n’est plus, l’éloignement vis-à-vis du corps médical ; et enfin les pratiques de dépistages et de prévention sont beaucoup moins fréquentes chez les personnes appartenant aux ménages les plus modestes. Il n’est donc pas étonnant de retrouver une surreprésentation de cette population chez les personnes atteintes du cancer du colon, des seins ou de l’utérus : pas de dépistage a priori mais un diagnostic a posteriori.

La raison première avancée est tout simplement la question du financement de la santé. Face au non remboursement des appareils dentaires ou des lunettes, ou même à cause du fait d’avancer le coût de la consultation et de ne pouvoir bénéficier du tiers payant, les ménages hésitent à se soigner. Et ce même avec la mise en place de la CMU : certains ne font pas la démarche de demander à en bénéficier, probablement parce que bénéficier de la CMU revient à être « étiqueter » comme pauvre (voir la notion d'étiquetage chez H. S. Becker), mais il y a également un effet de seuil qui conduit une partie non négligeable de la population modeste à dépasser les plafonds de ressources. Ainsi on peut lire dans l'étude de l'INSEE :
Ces écarts en matière de santé peuvent en effet provenir de la contrainte financière qui pèse sur les plus pauvres, malgré la mise en place de la couverture maladie universelle (CMU) et de sa complémentaire. D’une part, les plus pauvres ne demandent pas toujours à en bénéficier, d’autre part, leurs ressources peuvent être supérieures au plafond requis pour l’affiliation. Ainsi, 22 % des individus ayant de faibles revenus n’ont pas de complémentaire santé (CMU comprise) alors que ce n’est le cas que de 7 % du reste de la population.

Dans ces conditions, on a du mal à croire que les franchises médicales à la française n’aient pas un impact sur les dépenses de santé des plus démunis. Ces franchises amènent donc une modification profonde de notre façon de penser la solidarité.

Ailleurs… l’exemple de la Suisse

Laurent Mossu, correspondant à Genève pour France Inter, rapportait ce matin que la franchise annuelle en Suisse avait permis de réduire de 20% les dépenses de santé « à qualité de soin constante ». La franchise est fixée à 300 Francs Suisse (187€), plus une quote-part de 10% (sur toutes les dépenses de médecin, de médicaments ou d’hospitalisation) qui reste à la charge du malade jusqu’à un maximum de 437€. « Grosso modo, nous dit Laurent Mossu, 15% des dépenses de santé sont couvertes par les malades », et le gouvernement suisse a pour projet de faire doubler la quote-part. « Il considère que cette participation additionnelle est parfaitement supportable, ne pénalisant pas les patients atteints de maladies chroniques, ou à coûts élevés ». A croire qu’il n’y a pas de pauvre en Suisse…

(à vous de déterminer si cette dernière phrase relève du premier, du second ou du troisième degré)

Sources :

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mercredi 31 octobre 2007

En vrac... mais que du bon !

Pleins de bonnes choses à lire, encore et toujours !!


  • On continue avec un très bon billet de Christophe Foraison, que je salue au passage, sur les représentations de la structure sociale. Pour en savoir plus cliquez sur le lien : S'il te plait, dessine moi la société

  • Comme les profs de SES aiment bien les blogs, parfois ils en ont deux. Claude Bordes signe une brillante série "Mensonges et Statistiques" sur L'Antisophiste. Un flux de plus à mettre dans votre agrégateur...

  • Enfin, signalons la naissance de Science politique en ligne ! Longue vie à cette initiative qui a pour but, je cite, de recenser quelques travaux pour améliorer la diffusion de la recherche française en science politique sur Internet.

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mardi 30 octobre 2007

Service après vente... des billets de blog

Petites vacances, petits billets... Comme les vacances des profs ça sert à travailler (oui, oui, vous avez bien lu !) le format des billets est raccourci pendant quelques jours. Voire même il risque d'y avoir une interruption de service vers la fin de la semaine.

La lecture de la presse quotidienne économique a ceci de bien qu'elle permet d'assurer le service après-vente des billets postés ici ou là.

Dans La Tribune d'aujourd'hui (30 octobre 2007) on peut lire une brève en page 10 qui vient compléter ma précédente note sur les jeux videos :

Sony pessimiste pour sa division jeux video ; Quelques jours après la publication des résultats de son 2e trimestre fiscal, marqué par la bonne santé de sa branche électronique, le groupe japonais a annoncé s'attendre à une perted'exploitation de sa division jeux video deux fois plus lourde que prévu pour l'exercice en cours, qui s'achève fin mars 2008. Cette perte devrait atteindre 605 millions d'euros contre 302 millions prévus initialement.


En page 6 du quotidien, la suite de la cession de Danone Biscuits à l'américain Kraft Foods que j'avais eu l'occasion de présenter cet été :

Danone signe la cession de son pôle biscuits à Kraft ; Danone a vendu à l'américain Kraft Foods son pôle biscuit et produits céréaliers (dont la marque LU), pour 5,3 milliards d'euros. L'opération aprouvée par le conseil dadministration de Danone avait été annoncée en juillet. Elle demeure soumise à certaines conditions, notamment au feu vert de la Commission européenne dont la décision est attendue le 9 novembre. L'es deux groupes entendent clôturer la vente d'ici à la fin de l'année.


Sur la même page, deux articles et un encart sur la grève à Air France. On y parle de l'inexpérience des syndicalistes pour expliquer la situation de blocage, ainsi que de la nécessité de mettre en place le service minimum dans le transport aérien. Autant dire que cela illustre plutôt bien le dernier post sur le blog Econoclaste : Pourquoi les medias sont ils biaisés. Je vous renvoie aux deux notes de juin dernier portant sur le service minimum et le droit de grève (note 1 et note 2).

A suivre...

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lundi 29 octobre 2007

Fiscalité sur les dividendes...

Ne ratez pas ça :
"Les riches c'est fait pour être très riches..."

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vendredi 26 octobre 2007

Histoire@Politique

S'il existait, on dirait que le hasard fait bien les choses... J'apprends aujourd'hui la sortie du n°2 de la revue Histoire@Politique, la revue électronique du Centre d'histoire de Science po. Il tombe à point nommé, avec pour dossier central "Le pouvoir politique et l'histoire", dossier coordoné par... Laurent Wirth, que je citais abondemment hier. Analyse on ne peut plus fine, je vous conseille tout particulièrement l'article "Le pouvoir politique et l'enseignement de l'histoire. L'exemple des finalités civiques assignées à cet enseignement en France depuis Jules Ferry"

Sur la revue plus généralement, je me demande si le jeu de mot "Histoire apolitique" avec l'usage du "@" dans le titre est volontaire ou pas ? Je me demande également comment un site comme celui-ci (qui semble plutôt bien fait par ailleurs) n'ait pas de fils RSS. Et le web 2.0 alors ? Tout juste on trouve une vieille newsletter tout en bas de la colonne de droite (vous ne perdrez pas deux heures à la trouver comme ça).

Bon surf !

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jeudi 25 octobre 2007

Comprendre : la non lecture de la lettre de Guy Moquet

Lettre de Guy Moquet à ses parents

C'est retombé comme un soufflet, le Grenelle de l'environnement est passé par là mercredi, les annonces de Xavier Bertrand mardi... Et l'agenda politico-médiatique va vite, très vite, il passe d'une info à une autre, et à mon avis on n'est pas prêt d'entendre parler à nouveau de Guy Moquet. Bien sur, les JT de lundi soir sont revenus quelques minutes sur l'émotion suscitée par la lecture de la lettre dans les lycées, et puis quelques secondes sur le non déplacement de Nicolas Sarkozy dans le lycée Carnot où le jeune résistant communiste avait suivi sa scolarité. Mais finalement, avec la couverture médiatique pourtant conséquente lundi sur le sujet, on n'aura pas vraiment compris pourquoi ils n'ont pas voulu lire la lettre...

Des milliers de profs d'Histoire Géo ont signé des textes dans lesquels ils expliquaient pourquoi ils refuseraient de lire la lettre. Pourquoi il ne fallait pas confondre "devoir de mémoire" et "droit d'histoire". Pourquoi l'Ecole ne doit plus être pensée comme l'outil d'unification de la nation qu'elle était sous la IIIe République. Bien sûr les professeurs du service public d'éducation ont des missions claires : transmettre les valeurs de la République et notamment l'idéal laïque, qui exclut toute discrimination de sexe, de culture ou de religion, instruire les jeunes, contribuer à leur éducation, les former en vue de leur insertion sociale et professionnelle.

Mais ils ne sont plus là pour jouer les "instituteurs nationaux" (selon l'expression de Pierre Nora). Le temps du petit Lavisse et du Tour du Monde par deux enfants est révolu. L'école est là pour former des citoyens, capables d'esprit critique, capables de prendre les décisions importantes de leur vie en connaissance de cause, en connaissance de la réalité de notre société. On exerce l'esprit critique des jeunes non pas en sélectionnant ce qu'il y a de meilleur dans notre mémoire, mais en cherchant à se rapprocher de la vérité historique, sans mettre en avant les périodes les plus glorieuses, sans occulter les heures sombres.

Pour comprendre, il est bon de lire et relire ce texte de 2000 : "Histoire et Mémoire". Il est issu d'une conférence prononcée par Laurent Wirth, Inspecteur Général de l'Education Nationale et ancien professeur d'Histoire-Géographie. Je vous en livre ici quelques extraits significatifs.

Ce retour en force de la mémoire est caractérisé par son lien consubstantiel avec le présent au point de faire les titres de la presse. Les débats sur Vichy, notamment au moment du procès Papon et ceux sur la torture en Algérie sont des exemples frappants d'un véritable télescopage entre la mémoire et l'actualité, dans lequel les médias, les politiques et la justice prennent le pas sur les historiens, même si ceux-ci peuvent être convoqués comme experts. L'inscription dans l'actualité tend à l'emporter sur le regard de l'historien qui passe au second plan.

Les nouveaux modes de commémoration confirment que le présent prend le pas sur le passé : l'aspect festif et médiatique que prend la commémoration ( par exemple à l'occasion la célébration du bicentenaire de la Révolution) est significatif. On ne commémore tant aujourd'hui le passé que pour mieux célébrer ou condamner le présent.

Inscrite dans le présent, cette mémoire est le patrimoine de groupes vivants. De ce fait, comme l'a dit, dès les années trente, le sociologue Halbwachs qui est mort en déportation à Buchenwald, il y a autant de mémoires que de groupes. Elle est donc par nature plurielle. L'évolution des modes de commémoration est également significative de ce point de vue : la commémoration traditionnelle supposait un ordre et une hiérarchie qui descendait des sommets de l'Etat jusqu'aux écoliers rassemblés autour des monuments et sur les places publiques. Actuellement la commémoration sourd, au contraire, des profondeurs de la société, elle émane plutôt de groupes de solidarité et tend à déserter le national pour s'enraciner dans le local.

Enfin la mémoire est également, par nature, affective et sélective et faillible : elle a tendance à ne retenir que ce qui la conforte. Dans les débats sur la torture en Algérie, certaines associations répondent indignées, en mettant en avant leur propre mémoire fondée sur des atrocités commises par le FLN contre des civils et contre les Harkis. Cela peut déboucher sur un affrontement de mémoires antagonistes.

Ces mémoires éclatées, sélectives, souvent contraires, ne sont pas, on le voit bien, synonyme d'histoire.


Je rappelle que le texte ci-dessus n'a pas été écrit en réaction à la demande présidentielle de lecture de la lettre de Guy Moquet dans les lycées, puisqu'il date de 2000. Mais il est intéressant de constater comment, d'une certaine manière, l'évènement de lundi peut être interprété comme un retour en arrière dans la façon de célébrer la mémoire nationale, du haut de l'Etat vers le bas. Ou quand "la rupture" prend la forme du demi-tour...

L'opposition des professeurs n'était donc pas tant politique, comme on a voulu le montrer sur certaines chaines, que scientifique et éthique. Or la première compétence attendue chez les nouveaux professeurs actuellement en formation n'est autre que : agir en fonctionnaire de l'Etat, de manière éthique et responsable.

Liens :
Discours de N. Sarkozy au bois de Boulogne, le 16 mai 2007
Laurent Wirth, "Histoire et Mémoire", conférence de novembre 2000
"Agir en fonctionnaire de l'Etat et de manière éthique et responsable", BO du 4 janvier 2007, pp. 12-13
"Les missions du professeur", circulaire 97-123 du 23 mai 1997


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mercredi 24 octobre 2007

L'Attali ne se bonifie pas avec l'âge

Attali et Sarkozy sont dans un bateau

Dans un très bon article paru dans Le Monde daté du 24 octobre, Hervé Kempf fait un parallèlle intéressant entre le Jacques Attali des années 70 et celui des années 2000. Celui de 1970 était prudent, il venait de lire le rapport Meadows qui mettait en avant le fait que la recherche d'une croissance infinie était probablement ce qu'il pouvait arriver de pire à la planète Terre et à ses habitants. Il signait un papier titré "Vers quelle théorie économique de la croissance ?" dans lequel il expliquait combien la notion même de croissance se révélait (et se révèle toujours) être un mauvais indicateur du bonheur, de la satisfaction des individus.

Le rapport Meadows allait plus loin, en affirmant que l'absence de croissance n'était pas synonyme d'absence de progrès (sans pour autant proner la "décroissance") et qu'il fallait absolument repenser nos modes de production pour sauver le caillou sur lequel nous habitons. Il prévoyait les premières conséquences néfastes à horizon 2010. Nous étions en 1972 : 40 ans, probablement un horizon trop éloigné pour prendre pleinement conscience de l'urgence environnementale. Ce rapport émanait de chercheurs du prestigieux MIT, il était une commande du Club de Rome, qui lui assura un retentissement international. 35 ans avant le grenelle de l'environnement franco-français de l'an 2007.

Le Jacques Attali de 2007 a bien changé. Le 16 octobre dernier il était l'invité de François Demorand sur France Inter (écouter l'interview). Il affirmait alors que "la meilleure façon de ne pas polluer c'est de revenir à l'âge de pierre" tout en rappelant que "le secteur de l'environnement était, avec celui de la santé, le grand secteur de la croissance"... légèrement contradictoire. Et Hervé Kempf de mettre en exergue dans son article les oppositions entre certaines conclusions de la commission Attali et les propositions des groupes du Grenelle de l'environnement. De même que le Jacques Attali qui approuvait le rapport Meadows et les prémices d'une croissance 0 du PIB s'oppose à celui qui s'obstine à provoquer une croissance française à 5%.

Ce matin, Jacques Attali était invité sur Europe 1 : "opposer écologie et croissance est une bêtise intellectuelle profonde, puisqu'en réalité on ne peut pas améliorer l'environnement sans croissance. Ce n'est pas la croissance qui pollue c'est la production. Si on veut changer la nature de la production il faut évidemment croître, croître autrement". Un seul leitmotiv, toujours le même, la croissance. Seulement J. Attali semble avoir oublier que la notion de croissance est encore, aux dernières nouvelles, définie comme l'augmentation soutenue de la production. Donc par définition si la production pollue, la croissance pollue. Il faudrait "produire autrement pour croître autrement" nous dit il. Dont acte. Mais dans ces conditions, on aurait aimé que la mise en place du PIB Vert soit une initiative de la commission qu'il préside. Mais sur ce coup, c'est le Grenelle qui a une longueur d'avance...

Liens
Le Grenelle de l'environnement
Commission Attali : Libération de la croissance française
Club de Rome


et parce qu'il faut rire au moins 30 minutes par jour...

Vous aussi faites vous plaisir : http://martine.logeek.com/


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mardi 23 octobre 2007

Le New York Times critique l'amendement ADN


L'amendement ADN continue de faire parler de lui (voir ma précédente note : ADN et famille). Cette fois, l'attaque vient d'outre-atlantique, du grand quotidien The New York Times. L'agence de presse Reuters rapporte l'éditorial outré paru dans l'édition du 21 octobre du NYT. A suivre, la dépêche de Reuters et le lien vers l'article orginial.


La dépêche de Reuters :

Le New York Times part en guerre contre le projet de loi sur l'immigration de la France, qualifié d'"abject", qui introduit des tests ADN "comme fondement potentiel pour l'exclusion de familles immigrées cherchant à retrouver leurs parents qui vivent en France".

Dans un éditorial très virulent publié dimanche 21 octobre, le quotidien américain insiste sur le fait que l'utilisation de la génétique peut se révéler utile seulement "pour déterminer la culpabilité et l'innocence en matière criminelle", mais n'a "aucune place légitime au sein du droit de l'immigration". Le journal s'étonne que la France ne se souvienne pas des leçons imposées par son histoire. "En effet, rappelle le NYT, les premières notions de pseudo-science du 'sang' ont été introduites dans le droit français sous l'Occupation, par les Nazis et leurs collaborateurs de Vichy, avec les conséquences tragiques que l'on connaît".

Le NYT interpelle Sarkozy

S'il souligne que l'opposition à l'amendement sur les tests ADN a réuni des politiques de "centre-gauche", comme "des membres de la majorité de centre-droit encore pourvus de principe", le New York Times est choqué que les politiques français se soient contentés de "modifications d'ordre sémantique", qu'il juge largement insuffisantes.

Pour finir, le journal s'adresse directement au président français, "qui aurait pu à n'importe quel moment intervenir pour empêcher ce projet de loi, et en a encore la possibilité", mais qui "ne l'a jamais fait." Et conclut par cet appel, on ne peut plus clair : "Nicolas Sarkozy veut être considéré comme un homme d'Etat. Qu'il agisse en tant que tel".


Retrouvez l'article sur le site du NYT
Le Figaro se fait l'écho de l'édito du NYT

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lundi 22 octobre 2007

Louis Chauvel et l'âge des députés

Vive l'anti-refletsCe n'est pas la première fois, ni la dernière fois que l'on parlera de Louis Chauvel sur ce blog. Et ce n'est probablement pas la dernière fois que je parlerais de La vie des idées, nouveau magazine en ligne publié par La République des idées. J'en parlais d'ailleurs pas plus tard que la semaine dernière.

A la suite d'un article publié dans Le Monde au lendemain des élections législatives du printemps dernier (article que je commentais ici), Louis Chauvel s'est mis en tête d'étudier de plus près l'évolution de la moyenne d'âge de nos représentants à l'Assemblée Nationale. Une étude longitudinale comme on dit. Et ça donne ça, disponible gratuitement et intégralement en ligne. Vous aimiez les strobiloïdes, les graphiques un peu bizarres mais très parlant, vous allez adorer ça :


Bonne lecture !

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mercredi 17 octobre 2007

Sondages, opinion et régimes spéciaux

Ce matin deux sondages réalisés par BVA et CSA pour leurs clients, respectivement Le Figaro et L'Humanité, ont annoncé des résultats exactement opposés quant au sentiment des français à l'égard de la grève de demain, jeudi 18 octobre. Le Figaro - L'Huma (17.10.2007)Cela me rappelle un billet que j'avais rédigé au lendemain du second tour des élections Présidentielles. Dans ce billet je reprenais la célèbre formule de Pierre Bourdieu, l'opinion publique n'existe pas.

Et effectivment, je continue de croire que l'opinion publique n'existe pas, mais plus précisément qu'elle se construit. Pour ceux qui n'ont pas le courage de relire le billet de mai dernier, je colle ici le paragraphe en question :

Pourquoi l'opinion publique n'existe pas
[Selon Pierre Bourdieu,] les sondages supposent que tout le monde peut avoir une opinion sur tout. Ils surestiment à la fois l’intérêt et la compétence des personnes interrogées, et posent aux gens des questions qu’ils ne se posaient pas, et qu’ils n’avaient pas l’intention de se poser parce qu’elles ne les intéressent pas. Ils exercent par ailleurs un effet d’imposition de problématique par la formulation des questions. Ils amènent les personnes interrogées à se poser les problèmes dans des termes différents de ceux qu’ils auraient eux-mêmes utilisés. En agrégeant toutes les réponses, on leur accorde non seulement la même intensité mais également le même poids social alors qu’elles ne pèsent pas de la même manière. En supposant que toutes les opinions se valent, on oublie que chaque opinion dépend de la manière dont les gens s’insèrent dans les différents réseaux de sociabilité en fonction de leur âge, de leur sexe, ou de leur milieu professionnel.


Sur les sondages en eux-mêmes
Une fois ces quelques points rappelés, ne nous interdisons pas de lire les résultats des ces sondages. Vous les trouverez ici et . Qu'est ce qu'on regarde en premier ? La question posée bien sûr :

Pour BVA-Le Figaro :
Les syndicats de la SNCF et de la RATP appellent à une journée de grève le jeudi 18 octobre pour protester contre la réforme des régimes spéciaux de retraite. Vous-même pensez-vous que ce mouvement est tout à fait justifié, plutôt justifié, pas vraiment justifié ou bien pas justifié du tout ?


Pour CSA-L'Humanité :
Vous savez que plusieurs syndicats de la SNCF, de la RATP, d'EDF-GDF, de l'ANPE, de l'UNEDIC, de l'Education nationale appellent à une journée nationale d'action et de grève le 18 octobre prochain, notamment sur l'avenir du système de retraite et des régimes spéciaux . Quelle est votre attitude à l'égard de ce mouvement ?


Première remarque, les formulations diffèrent grandement. Or on sait que les questions orientent fortement les réponses. Dans le cas de BVA, le mouvement syndical est présenté comme "protestataire" et allant "contre" une "réforme des régimes spéciaux". Dans la formulation de CSA, le même mouvement est présentée comme une journée "d'action", et non pas "contre les régimes spéciaux" mais "sur l'avenir du système des retraites" puis ensuite celui des régimes spéciaux.

En présentant le mouvement uniquement sous l'angle de la contestation, BVA a biaisé sa question. En posant la question des régimes spéciaux à l'intérieur de celle de l'avenir du système de retraite, CSA l'a pratiquement biaisée également : en effet les gros titres de l'Huma, forcément courts et nécéssairement percutants, ont pratiqué le raccourci en annonçant "54% de français soutiennent la grève".

Du côté des réponses...
Là aussi la différence entre les deux instituts est assez éloquante. Pour BVA seulement quatre choix : le mouvement peut être aux yeux des français soit tout à fait justifié, soit plutôt justifié, soit pas vraiment justifié, ou enfin pas du tout justifié. Reste un résidu de "Ne se prononce pas" (NSP) dont on parlera plus loin. Pour CSA maintenant, changement de programme : l'éventail est plus large, 5 réponses sont possibles. Le soutien, la sympathie, l'indifférence, l'opposition, et enfin l'hostilité. BVA n'avait même pas envisagé que l'on puisse être indifférent à ce mouvement. Pourtant, si on ne considère que les conséquences du mouvement, extrait de son contexte social (la question des régimes spéciaux), une majorité de français n'utilisent pas les transports en commun pour se rendre à leur travail. Ils ne seront donc pas touchés par le mouvement... ils peuvent donc logiquement y être indifférents. En réduisant le champ des possibles pour ses enquêtés, BVA les a obligé à se situer d'un côté ou de l'autre de la barrière. Bien sûr il y avait le NSP pour montrer son indifférence, mais il n'est pas proposé par les enquêteurs au téléphone comme peut l'être la proposition "Indifférent" dans l'autre sondage.

Il faut s'arrêter sur cette indifférence : je reprends Question de sociologie de Pierre Bourdieu à propos des enquêtes par sondage.
L'information la plus importante qu'un sondage livre à propos d'un groupe, ce n'est pas le taux de oui ou de non, le taux de pour ou de contre, mais le taux de non réponses, c'est-à-dire la probabilité, pour ce groupe d'avoir une opinion.

Et je vous invite vivement à lire ou relire le reste des pages 238 à 242 de cet ouvrage.

Il y aurait tant de choses à dire, c'est frustrant de s'arrêter là. Mais pourtant il faut bien, car à chaque jour suffit sa peine.

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mardi 16 octobre 2007

A propos du conseil scientifique de La vie des Idées


Laviedesidées.fr est en ligne. Il s'agit d'un nouveau "magazine d’analyse et d’information sur le débat d’idées". On connaissait déjà La République des Idées, la collection dirigée par Pierre Rosanvallon et Thierry Pech au sein des éditions du Seuil. Les ouvrages parus dans cette collection se remarquent par leur couverture orange, et à la fois leur qualité et leur concision. En quelques mois elle a su gagner le statut d'incontournable pour qui s'intéresse aux questions économiques et sociales. La vie des idées semble partir sur les mêmes bases, tout en profitant des avantages des technologies de l'information et de la communication : rendre accessible (par la gratuité) les idées, favoriser le foisonnement intellectuel en supprimant les obstacles matériels entre l'émission et la réception de productions scientifiques rigoureuses, le tout dans le but d'améliorer la qualité du débat d'idées. Les objectifs sont parfaitement louables.

Mais une visite rapide de la rubrique "qui sommes nous ?" me fait m'interroger sur un point précis ; voici la composition du conseil scientifique de La vie des idées, cherchez l'intrus :

Stéphane Audoin-Rouzeau (EHESS), Edouard Bard (Collège de France), Loïc Blondiaux (Université de Lille), Pierre Bouretz (EHESS), Robert Castel (EHESS), Eve Chiapello (HEC), Daniel Cohen (ENS), Stanislas Dehaene (Collège de France), Mireille Delmas-Marty (Collège de France), Philippe Descola (Collège de France), Mamadou Diouf (Columbia University), Jean-Luc Domenach (CERI), François Dubet (Université de Bordeaux II), Jean-Paul Fitoussi (OFCE), Carlos Forment (New School for Social Research), Antoine Garapon (IHEJ), Nilufer Göle (EHESS), Roger Guesnerie (Collège de France), Sudhir Hazareesingh (Oxford University), Christophe Jaffrelot (CERI), Baber Johansen (Harvard University), Sunil Khilnani (Johns Hopkins University), Henry Laurens (Collège de France), Claude Lefort (EHESS), Bernard Manin (EHESS), Pierre-Michel Menger (EHESS), Olivier Mongin (Esprit), Serge Paugam (EHESS), Thomas Piketty (Ecole d’Economie de Paris), Alain Prochiantz (Collège de France), Jacques Revel (EHESS), Olivier Roy (CERI), Jean-Frédéric Schaub (EHESS), John Scheid (Collège de France), Patrick Weil (CNRS)

L'avez vous trouvé ? Loïc Blondiaux est le seul membre de ce conseil présenté comme un universitaire (en faisant exception de ceux qui officient à l'étranger). Voilà une caractéristique de la recherche (et plus largement de l'enseignement supérieur) à la française. La reconnaissance scientifique ne passe pas par les universités mais par les grandes écoles et les organismes de recherche. Et cela semble encore plus prononcé dans les sciences sociales que dans les sciences dites dures.

Qui est donc ce Loïc Blondiaux ? La solution de facilité, recherche sur Google. Premier résultat, cliquons ! On peut lire [Loïc Blondiaux] est désormais Professeur en Science Politique à l'IEP de Lille. Ah, l'IEP de Lille, une grande école... l'honneur est sauf, et le système dual de l'enseignement supérieur français a de beaux jours devant lui.


Edit (18/10/2007) : Suite à une discussion avec Baptiste Coulmont (voir les Commentaires), il convient de préciser un certain nombre de choses. L'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales est régie par la même loi que les universités (Loi Savary de 1984 relative aux Etablissements Publics à Caractère Scientifique, Culturel et Professionnel). L'EHESS est néanmoins classé parmis les "Grands Etablissements" en vertu d'un décret de 1985. Elle déroge donc à de nombreuses dispositions de la loi Savary, et son organisation et son fonctionnement sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

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