petite réaction à chaud à propos de Cdanslair
Un billet au ton un peu plus personnel qu'à l'habitude mais bon... J'aime bien l'émission Cdanslair sur France 5. Je trouve le concept plutôt sympathique, les intervenants souvent intéressants, l'animateur assez pro quoiqu'il fait souvent venir les mêmes. Et ce soir, ça n'a pas loupé, on parlait des fonctionnaires, il a donc invité Jacques Marseille. David Martinon n'a qu'à bien se tenir, on lui dispute la place de porte-parole de Nicolas Sarkozy. Bref j'ai trouvé l'émission de ce soir décevante, parce que déséquilibrée, et je le fais savoir par voie de blog.
Jacques Marseille, historien et économiste. J'ai pour habitude de vanter les mérites de l'interdisciplinarité, mais là j'ai quand même l'impression que je tiens mon exception qui confirme la règle. A vouloir faire deux choses en même temps, il en réussit aucune. Et Jacques Marseille c'est de pire en pire. Vous me direz, quand y a Marseille sur le plateau, y a pas Elie Cohen. C'est vrai qu'en terme de coût d'opportunité on y gagne, mieux vaut avoir un Marseille en mauvaise forme, qu'un Cohen qui aboie à tout bout de champ sur tout ce qui est de l'autre côté du clivage droite-gauche par rapport à lui.
Enfin bon bref, il se fait tard et je m'emporte. Tachons de retrouver le fil de l'histoire. Sur le plateau on retrouvait un autre habitué, Dominique Reynié. Souvent placé à gauche de l'écran (Marseille est toujours à droite, mais bizarrement Cohen se balade en fonction de l'émission), D. Reynié n'a pas toujours été dans la défense des fonctionnaires, le sujet du jour.
Et puis il y avait deux nouveaux : le patron de L'Etudiant, "publication incontournable de la vie étudiante" dixit Y. Calvi, qui vit des marroniers nombreux dans le PUF (le Paysage Universitaire Français), mais qui est le plus souvent déconnecté des réalités des campus universitaires (L'Etudiant aime bien mettre en avant les Grandes Ecoles qui payent les espaces de pub... comment ça je sors ?) : à la fin de l'émission, il hurle que le grand chantier c'est le statut social de l'étudiant (c'est vrai, mais c'est démagogique de sa part) et qu'en plus ça couterait rien (sic).
Le deuxième nouveau était une nouvelle : 20% de femmes sur le plateau au milieu de 80% d'hommes, vive la parité. En plus elle était la caution "jeune et jolie" instrumentalisée "by herself" (total respect, s'instrumentaliser soi même, c'est toujours très fort). En effet, elle a cru bon de rappeler que, elle, elle faisait partie des jeun's, de la génération 30-40, celle qui bouge, les forces vives, tout ça, enfin celle qui a voté majoritairement N. Sarkozy aux dernières élections avec les plus de 65 ans. Un jour il faudra dire que la majorité des électeurs de N. Sarkozy, les plus de 65 ans, sont aussi ceux qui ne sont plus du tout concernés par l'avenir du système de retraite, mais on va pas déclencher une guerre inter-générationnelle, c'est pas bien. Cette jeune femme est présentée comme une responsable de l'iFRAP, Institut Français de Recherche sur les Administrations Publiques, "un organisme qui travaille sur les politiques publiques". Ca veut tout dire et rien dire. Mais bon, je me dis que ça doit être un labo de recherche en science politique, genre un concurrent du CRAPE, puisque ça sonne pareil.
En fait non. L'IFRAP, je m'en rends compte en faisant une recherche sur le net, c'est un think tank de droite, plutôt "obscur et sombre" comme dirait les inconnus, avec un site internet qui fait peur. Pour planter le décor, le fondateur de ce groupe a rédigé deux livres annoncés comme rien de moins que des "best sellers" : Les profiteurs de l'Etat, et La dictature des syndicats. Bref, des best sellers inconnus quoi. En plus ils sont proches de Liberté Chérie (droite extrême) et appelle à manifester dans toutes les manifs anti-grèves. Bravo Yves Calvi pour la présentation tout à fait impartiale des invités.
Bref, il n'y avait pas grand monde pour sauver le fonctionnaire gréviste (donc non payé, je tiens à le rappeler). Et Jacques Marseille, ma bête noire, y a été de son lot d'imprécisions, de carricatures, de manipulations des mots dont il est très friand. En vrac :
"les fonctionnaires de catégorie A se recrute à Bac+5", raté les concours sont ouverts à niveau Bac+3 sinon tous les profs auraient des Master... ça se saurait.
"il y a des fonctionnaires de catégorie D"... Lui qui veut que la France regarde vers l'avant et accepte la réforme, il semble avoir oublié que les catégores D ont été supprimées en... 1988 ! Eh oui, 20 ans, ça passe vite.
"Les fonctionnaires cotisent 7,85% de leur traitement pour leur retraite, beaucoup moins que dans le privé", mais il ne précise pas que les cheminots cotisent 36% de leurs salaires bruts, beaucoup plus que dans le privé. Mais ça, on le dit pas.
"Le progrès de l'espérance de vie est colossal, on vit 25 à 30 ans après son départ en retraite"... 60+30 = 90. Espérance de vie à 90 ans, c'est pas mal, sauf que la moyenne française plafonne à 79 ans, et que le Japon est en tête à 82. On oublie aussi souvent de dire que les ouvriers ont cotisé pendant longtemps sans en profiter : leur espérance de vie était inférieur à l'age de départ à la retraite jusque dans les années 70, les ouvriers cotisaient pour leurs patrons.
"la greve des fonctionnaires coute des centaines de millions"... mais personne ne déduit les économies que représentent les traitements non versés (les grévistes ne sont pas payés, je le répète). Avec un salaire brut moyen dans la fonction publique d'Etat à 2540€ (a titre de comparaison, 2513€ dans le privé, mais les agents de l'Etat sont sensiblement plus diplômés que les salariés du privé, donc au final les agents du public sont moins bien payés), un jour de grève représente une économie de 85€, soit près de 130 millions rapportés au nombre de gréviste.
Mais rendons à Cesar... J. Marseille ne s'est pas trompé lorsqu'il s'est agit de compter les syndicalistes en France. Ils sont 1 880 000, soit près de 9% de la population salariée. Après une baisse continue des effectifs, ces derniers semblent stagner voire progresser légèrement. Mais rien ne vaut une petite lecture personnelle de ce dossier de la DARES.
Jacques Marseille, historien et économiste. J'ai pour habitude de vanter les mérites de l'interdisciplinarité, mais là j'ai quand même l'impression que je tiens mon exception qui confirme la règle. A vouloir faire deux choses en même temps, il en réussit aucune. Et Jacques Marseille c'est de pire en pire. Vous me direz, quand y a Marseille sur le plateau, y a pas Elie Cohen. C'est vrai qu'en terme de coût d'opportunité on y gagne, mieux vaut avoir un Marseille en mauvaise forme, qu'un Cohen qui aboie à tout bout de champ sur tout ce qui est de l'autre côté du clivage droite-gauche par rapport à lui.
Enfin bon bref, il se fait tard et je m'emporte. Tachons de retrouver le fil de l'histoire. Sur le plateau on retrouvait un autre habitué, Dominique Reynié. Souvent placé à gauche de l'écran (Marseille est toujours à droite, mais bizarrement Cohen se balade en fonction de l'émission), D. Reynié n'a pas toujours été dans la défense des fonctionnaires, le sujet du jour.
Et puis il y avait deux nouveaux : le patron de L'Etudiant, "publication incontournable de la vie étudiante" dixit Y. Calvi, qui vit des marroniers nombreux dans le PUF (le Paysage Universitaire Français), mais qui est le plus souvent déconnecté des réalités des campus universitaires (L'Etudiant aime bien mettre en avant les Grandes Ecoles qui payent les espaces de pub... comment ça je sors ?) : à la fin de l'émission, il hurle que le grand chantier c'est le statut social de l'étudiant (c'est vrai, mais c'est démagogique de sa part) et qu'en plus ça couterait rien (sic).
Le deuxième nouveau était une nouvelle : 20% de femmes sur le plateau au milieu de 80% d'hommes, vive la parité. En plus elle était la caution "jeune et jolie" instrumentalisée "by herself" (total respect, s'instrumentaliser soi même, c'est toujours très fort). En effet, elle a cru bon de rappeler que, elle, elle faisait partie des jeun's, de la génération 30-40, celle qui bouge, les forces vives, tout ça, enfin celle qui a voté majoritairement N. Sarkozy aux dernières élections avec les plus de 65 ans. Un jour il faudra dire que la majorité des électeurs de N. Sarkozy, les plus de 65 ans, sont aussi ceux qui ne sont plus du tout concernés par l'avenir du système de retraite, mais on va pas déclencher une guerre inter-générationnelle, c'est pas bien. Cette jeune femme est présentée comme une responsable de l'iFRAP, Institut Français de Recherche sur les Administrations Publiques, "un organisme qui travaille sur les politiques publiques". Ca veut tout dire et rien dire. Mais bon, je me dis que ça doit être un labo de recherche en science politique, genre un concurrent du CRAPE, puisque ça sonne pareil.
En fait non. L'IFRAP, je m'en rends compte en faisant une recherche sur le net, c'est un think tank de droite, plutôt "obscur et sombre" comme dirait les inconnus, avec un site internet qui fait peur. Pour planter le décor, le fondateur de ce groupe a rédigé deux livres annoncés comme rien de moins que des "best sellers" : Les profiteurs de l'Etat, et La dictature des syndicats. Bref, des best sellers inconnus quoi. En plus ils sont proches de Liberté Chérie (droite extrême) et appelle à manifester dans toutes les manifs anti-grèves. Bravo Yves Calvi pour la présentation tout à fait impartiale des invités.
Bref, il n'y avait pas grand monde pour sauver le fonctionnaire gréviste (donc non payé, je tiens à le rappeler). Et Jacques Marseille, ma bête noire, y a été de son lot d'imprécisions, de carricatures, de manipulations des mots dont il est très friand. En vrac :
"les fonctionnaires de catégorie A se recrute à Bac+5", raté les concours sont ouverts à niveau Bac+3 sinon tous les profs auraient des Master... ça se saurait.
"il y a des fonctionnaires de catégorie D"... Lui qui veut que la France regarde vers l'avant et accepte la réforme, il semble avoir oublié que les catégores D ont été supprimées en... 1988 ! Eh oui, 20 ans, ça passe vite.
"Les fonctionnaires cotisent 7,85% de leur traitement pour leur retraite, beaucoup moins que dans le privé", mais il ne précise pas que les cheminots cotisent 36% de leurs salaires bruts, beaucoup plus que dans le privé. Mais ça, on le dit pas.
"Le progrès de l'espérance de vie est colossal, on vit 25 à 30 ans après son départ en retraite"... 60+30 = 90. Espérance de vie à 90 ans, c'est pas mal, sauf que la moyenne française plafonne à 79 ans, et que le Japon est en tête à 82. On oublie aussi souvent de dire que les ouvriers ont cotisé pendant longtemps sans en profiter : leur espérance de vie était inférieur à l'age de départ à la retraite jusque dans les années 70, les ouvriers cotisaient pour leurs patrons.
"la greve des fonctionnaires coute des centaines de millions"... mais personne ne déduit les économies que représentent les traitements non versés (les grévistes ne sont pas payés, je le répète). Avec un salaire brut moyen dans la fonction publique d'Etat à 2540€ (a titre de comparaison, 2513€ dans le privé, mais les agents de l'Etat sont sensiblement plus diplômés que les salariés du privé, donc au final les agents du public sont moins bien payés), un jour de grève représente une économie de 85€, soit près de 130 millions rapportés au nombre de gréviste.
Mais rendons à Cesar... J. Marseille ne s'est pas trompé lorsqu'il s'est agit de compter les syndicalistes en France. Ils sont 1 880 000, soit près de 9% de la population salariée. Après une baisse continue des effectifs, ces derniers semblent stagner voire progresser légèrement. Mais rien ne vaut une petite lecture personnelle de ce dossier de la DARES.
10 commentaires:
“Cette jeune femme est présentée comme une responsable de l'iFRAP (…) je me dis que ça doit être un labo de recherche en science politique, genre un concurrent du CRAPE”
De l'intérêt d'avoir
-- des labos avec de vrais noms au lieu d'acronymes ridicules
-- des sites Internet et des annuaires mieux documentés
La capacité des journalistes à inviter tout et n'importe quoi reste stupéfiante, mais il y a peu de garde-fous pour les y empêcher.
Je me pose toujours cette question à propos de J. Marseille : comment peux-t-on se présenter comme historien et économiste quand on est reconnu par aucune des deux communautés en question et qu'en plus on ne possède pas de diplôme concernant la seconde que l'on méprise par ailleurs ?
Excellente note par ailleurs.
Et bah moi, j'aime bien tes billets "un peu plus personnels". Tu devrasi en écrire plus souvent.
Bon courage,
Jérôme
j'étais devant l'émission et je me suis arraché les cheveux du début à la fin.
je dois dire que je me sens "pris en otage" par ce type d'émission.
Avez-vous joué à compter les "vrais problèmes/questions dans c'pays" de Jacques Marseille ?
merci pour vos commentaires. Nous ne sommes visiblement pas les seuls à être mécontents du plateau d'hier soir : ça rale sur le forum de l'emission
Un compte rendu d'une émission de septembre avec...Jacques Marseille.
Chez Acrimed:
http://www.acrimed.org/article2695.html
il faudrait faire une petite étude quantitative sur les zigues invités à c dans l'air: je pense ne pas me tromper en disant qui aurait le plus fort taux de présence: Jacques Marseille, Elie Cohen, Dominique Reynié, Roland Cayrol, Christophe Barbier...lesquels sont aussi omniprésents sur les chaînes d'info
C'est Bourdieu qui parlait de la circulation d'une info circulaire, non? ;)
Bon, toutes les opinions sont dans la nature... Il n'empêche qu'on peut être un peu "ouvert" d'esprit et accepter d'avoir d'autres points de vue que les siens, surtout quand on est formaté "gaucho-un-peu-borné-depuis-toujours"...
L'émission C'dans l'air est excellente et sert justement à permettre des rencontres différentes. Qu'un(e) participant(e) s'affirme comme soutien de N.Sarkozy est-ce choquant ? Quel est le problème ? Quel terrorisme intellectuel cherche-t-on à installer ? Les mêmes gauchos produisant les mêmes nuisances intellectuelles on commence à être habitué...
Leur esprit n'est pas très extensible ni ouvert depuis 40 ans qu'ils radotent sur les mêmes lunes qui ont partout échoué. Il faudra bien un jour qu'ils ouvrent les yeux.
Mais cela aussi fait partie du débat. Encore faut-il être assez ouvert pour l'admettre.
surtout quand on est formaté "gaucho-un-peu-borné-depuis-toujours"
Je ne le prends pas perso. Je ne sais pas à qui vous faisiez allusion mais bon...
Sur la suite de votre commentaire, courageux anonyme, vous avez un petit train de retard. Milton Friedman n'est plus à la mode. Et les archaïques d'hier apparaissent quelque peu moderne ces temps-ci. Changement de paradigme ou pas, encore trop tôt pour le dire...
Enregistrer un commentaire