vendredi 13 avril 2007

De la loterie à la tromperie


La semaine dernière la Cimade a rendu public un rapport : De la loterie à la tromperie. Il s'agit d'une enquête sur les conditions d'application de la circulaire du 13 juin 2006, signée par N. Sarkozy, relative à la régularisation des familles étrangères d'enfants scolarisés. Avant son application, l'annonce de cette circulaire avait redonné espoir à des milliers de familles. De nombreux collectifs RESF se sont constitués un peu partout en France, les associations se sont mises au travail pour épauler les familles dans leurs démarches administratives. Oui mais voilà, c'était sans compter sur le parcours d'obstacle administratif, le médiateur pompier-pyromane Arno Klarsfeld, les critères appliqués de façon arbitraire, dans un manque de transparence manifeste. En 50 pages, ce rapport retrace de manière simple, dépassionnée, efficace et insoupçonnable, le quotidien de familles étrangères humiliées par l'injustice. Il était censé interpeller les candidats à la présidentielle, mais force est de constater que le sujet n'émerge guère dans le débat.

Et pourtant, nous avons besoins d'eux.
François Héran, à la tête de l'Institut National des Etudes Demographiques (INED) depuis 1999, tente régulièrement de faire tomber les préjugés sur l'immigration. En 2004 il avait signé un numéro de Population et société (le bulletin mensuel de l'INED) dans lequel il revenait sur 5 idées reçues sur l'immigration.
  1. La France n'est pas un pays d'immigration massive.
  2. Le taux de fécondité n'est pas massivement dû aux familles immigrées.
  3. L'immigration irrégulière n'est pas innombrable.
  4. La statistique publique n'est pas impuissante pour comptabiliser les immigrés.
  5. Accueillir l'immigration ne signifie pas accueillir la misère du monde.
Il vient de publier dernièrement Le temps des immigrés à la République des idées. Toutes les projections démographiques montrent que l'immigration va devenir à la fois le principal facteur de croissance de la population, mais aussi une solution pour pallier les nombreux départs à la retraite des papy-boomers. Selon les projections de l'INSEE, alors qu'en 2005 la France comptait 2.2 actifs pour un inactif, il n'y aurait plus que 1.4 actif pour 1 inactif en 2050. Et ce vieillissement de la population n'est pas tant dû à un taux de fécondité faible - certes les enfants du baby-boom n'ont pas suivi l'exemple de leurs parents - puisque celui-ci a presque atteint le taux de renouvellement des générations (2.1 enfants/femme) avec 1.94 enfant/femme (champion d'Europe !). Non le vieillissement de la population française est plutôt la conséquence de l'allongement de l'espérance de vie : c'est frappé au coin du bon sens, mais ça va mieux en le disant. En clair, il ne suffirait pas d'un nouveau baby-boom pour régler notre problème.

Dominique Reynié, polititologue au CEVIPOF, rappelait très justement ces derniers jours sur le plateau de C dans l'air qu'il y avait un choix politique à faire entre l'augmentation de l'âge à la retraite ou l'accueil massif d'une population immigrée pour faire face à la diminution de la population active française dans les 40 années à venir. Ce choix est un véritable choix de société, qui fait clivage entre la gauche et la droite dans ce pays. A chacun de choisir son camp.

Update : Daniel Schneidermann parle du rappot de la CIMADE sur le BigBangBlog ici et encore ici.

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