mardi 27 novembre 2007

Rapport Olivennes, à la benne !

Le titre est un peu racolleur, il est vrai. Mais que voulez vous ? Le rapport Olivennes - du nom du PéDéGé de la Fnac - sur le piratage sur internet provoque un tollé, et pas seulement chez les associations de consommateurs et d'utilisateurs du Web. Les économistes bloggers ont laché les chiens sur le texte qui plaisait tant à Patrick Bruel et ses amis. Pour y voir un peu plus clair, j'ai recensé une bonne partie des notes qui en parlent :

@ Regards croisés sur l'économie : De Rackham le Rouge à Loïc, 11 ans
@ Notes d'un économiste : Le rapport de la mission Olivennes
@ L'éconoclaste : Le plus vif d'entre nous

Moins économique, mais non moins expert, le très bon Ratiatum :
Le rapport décrypté point par point

Et toujours sur Ratiatum, le très croustillant :
Petits mensonges de Denis Olivennes

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lundi 26 novembre 2007

et ils pompaient...

Un peu d'humour dans ce monde de brutes... Vous l'avez peut-être déjà reçu dans vos boites mails, mais je ne résiste pas à l'envie de le partager. Monsieur Olivennes, je suis désolé mais je n'ai pas trouvé qui était l'auteur de ce très bon document. Je ne peux donc pas le retribuer.

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mercredi 21 novembre 2007

Du luddisme à la SNCF ?

Ce matin l'info en tête de gondole c'était le "sabotage coordonné" de lignes grande vitesse aux quatre coins de la France (ou plus précisément de l'étoile ferroviaire). Comme un non dit, le doute planait : était-ce des cheminots qui avaient volontairement dégradé leur propre outil de travail (encore que les infrastructures ferroviaires sont entretenues par Réseau Férré de France, mais on ne va pas rentrer dans les détails) ? La dégradation de l'outil de travail, le luddisme, n'est pourtant pas dans la culture ouvrière française, et encore moins dans la culture cheminotte, très attachée aux machines et aux voies. D'ailleurs le mot "Cheminot" qui apparait dans la deuxième moitié du XIXè siècle désignait précisément ceux qui construisaient et entretenaient les voies, les chemins de fer. Et aujoud'hui le terme désigne tout employé de la SNCF, roulants comme sédentaires. Petite histoire du luddisme, et retour sur la notion de sabotage...

Du sabotage...
Il est assez curieux que la direction de la SNCF ait employée le terme de "sabotage" pour décrire les exactions commises cette nuit. Historiquement le saboteur était un employé des chemins de fer qui, dans les gares de triage, posait des sabots de bois sur les voies pour ralentir le mouvement des wagons lorsqu'ils n'étaient pas accrochés à une loco. Toujours dans l'histoire des chemins de fer, l'action de sabotage (au sens où on l'entend aujourd'hui) consistait pour les cheminots résistants à l'occupant pendant la seconde guerre mondiale, à dégrader les infrastructures ferroviaires de manière à empêcher la déportation de juifs, à retarder le ravitaillement des occupants, etc. Cf la photo qui illustre le billet. A l'heure où Nicolas Sarkozy met en avant le courage du jeune résistant communiste Guy Môcquet, il est curieux qu'un terme qui, de plus, trouve une connotation positive dans l'histoire des chemins de fer se retrouve utilisé pour qualifer les dégradations. Les "casseurs" assimilés à des "héros résistants", seraient opposés à la réforme des régime spéciaux, donc en résistance contre le gouvernement ? L'emploi du terme à rajouté à la suspicion. Mais il faut bien reconnaître qu'il n'existe pas énormément de synonymes, donc de solutions alternatives pour les nommer.

... au luddisme.
Casser son outil de travail, cela porte un nom, c'est le luddisme. Tiré du nom de Ned Ludd, ouvrier du textile en Grande Bretagne en pleine révolution industrielle, qui aurait détruit des métiers à tisser, les machines étant accusées de détruire des emplois. On retrouve ici la peur du machinisme et plus globablement des innovations technologiques, idée que Joseph Alois Schumpeter a combattu en affirmant que le processus d'innovation consistait en une destruction-créatrice (ou création-destructrice mais c'est un autre débat). Les destructions d'emplois sont compensées par des créations nouvelles liées précisément aux nouvelles technologies, en amont comme en aval de celles-ci (il faut des gens pour les construire, les faire fonctionner, les entretenir, et pour assurer des débouchés nouveaux offerts par l'arrivée de ces machines). Mais le luddisme n'est guère employé en France, si ce n'est la révolte des canuts à Lyon en 1831, lorsque les tisseurs font arrêter les métiers à tissers parfois par la force.

Détruire l'outil de travail est un moyen d'action exceptionnel, qui est utilisé lorsque la négociation est totalement bloquée, et que les autres moyens de contestation ont tous été utilisés (souvenez-vous les salariés de Cellatex menaçant de faire exploser leur usine de produits chimiques et d'entraîner ainsi la pollution extrême d'une rivière dans les Ardennes). Or le round de négociations ne fait que commencer à la SNCF. On peut alors se demander à qui profite le crime... et rappeler que pour l'instant, rien ne prouve que ce sont des cheminots qui ont saccagé les LGV.

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mardi 20 novembre 2007

petite réaction à chaud à propos de Cdanslair

Un billet au ton un peu plus personnel qu'à l'habitude mais bon... J'aime bien l'émission Cdanslair sur France 5. Je trouve le concept plutôt sympathique, les intervenants souvent intéressants, l'animateur assez pro quoiqu'il fait souvent venir les mêmes. Et ce soir, ça n'a pas loupé, on parlait des fonctionnaires, il a donc invité Jacques Marseille. David Martinon n'a qu'à bien se tenir, on lui dispute la place de porte-parole de Nicolas Sarkozy. Bref j'ai trouvé l'émission de ce soir décevante, parce que déséquilibrée, et je le fais savoir par voie de blog.

Jacques Marseille, historien et économiste. J'ai pour habitude de vanter les mérites de l'interdisciplinarité, mais là j'ai quand même l'impression que je tiens mon exception qui confirme la règle. A vouloir faire deux choses en même temps, il en réussit aucune. Et Jacques Marseille c'est de pire en pire. Vous me direz, quand y a Marseille sur le plateau, y a pas Elie Cohen. C'est vrai qu'en terme de coût d'opportunité on y gagne, mieux vaut avoir un Marseille en mauvaise forme, qu'un Cohen qui aboie à tout bout de champ sur tout ce qui est de l'autre côté du clivage droite-gauche par rapport à lui.

Enfin bon bref, il se fait tard et je m'emporte. Tachons de retrouver le fil de l'histoire. Sur le plateau on retrouvait un autre habitué, Dominique Reynié. Souvent placé à gauche de l'écran (Marseille est toujours à droite, mais bizarrement Cohen se balade en fonction de l'émission), D. Reynié n'a pas toujours été dans la défense des fonctionnaires, le sujet du jour.

Et puis il y avait deux nouveaux : le patron de L'Etudiant, "publication incontournable de la vie étudiante" dixit Y. Calvi, qui vit des marroniers nombreux dans le PUF (le Paysage Universitaire Français), mais qui est le plus souvent déconnecté des réalités des campus universitaires (L'Etudiant aime bien mettre en avant les Grandes Ecoles qui payent les espaces de pub... comment ça je sors ?) : à la fin de l'émission, il hurle que le grand chantier c'est le statut social de l'étudiant (c'est vrai, mais c'est démagogique de sa part) et qu'en plus ça couterait rien (sic).

Le deuxième nouveau était une nouvelle : 20% de femmes sur le plateau au milieu de 80% d'hommes, vive la parité. En plus elle était la caution "jeune et jolie" instrumentalisée "by herself" (total respect, s'instrumentaliser soi même, c'est toujours très fort). En effet, elle a cru bon de rappeler que, elle, elle faisait partie des jeun's, de la génération 30-40, celle qui bouge, les forces vives, tout ça, enfin celle qui a voté majoritairement N. Sarkozy aux dernières élections avec les plus de 65 ans. Un jour il faudra dire que la majorité des électeurs de N. Sarkozy, les plus de 65 ans, sont aussi ceux qui ne sont plus du tout concernés par l'avenir du système de retraite, mais on va pas déclencher une guerre inter-générationnelle, c'est pas bien. Cette jeune femme est présentée comme une responsable de l'iFRAP, Institut Français de Recherche sur les Administrations Publiques, "un organisme qui travaille sur les politiques publiques". Ca veut tout dire et rien dire. Mais bon, je me dis que ça doit être un labo de recherche en science politique, genre un concurrent du CRAPE, puisque ça sonne pareil.

En fait non. L'IFRAP, je m'en rends compte en faisant une recherche sur le net, c'est un think tank de droite, plutôt "obscur et sombre" comme dirait les inconnus, avec un site internet qui fait peur. Pour planter le décor, le fondateur de ce groupe a rédigé deux livres annoncés comme rien de moins que des "best sellers" : Les profiteurs de l'Etat, et La dictature des syndicats. Bref, des best sellers inconnus quoi. En plus ils sont proches de Liberté Chérie (droite extrême) et appelle à manifester dans toutes les manifs anti-grèves. Bravo Yves Calvi pour la présentation tout à fait impartiale des invités.

Bref, il n'y avait pas grand monde pour sauver le fonctionnaire gréviste (donc non payé, je tiens à le rappeler). Et Jacques Marseille, ma bête noire, y a été de son lot d'imprécisions, de carricatures, de manipulations des mots dont il est très friand. En vrac :
"les fonctionnaires de catégorie A se recrute à Bac+5", raté les concours sont ouverts à niveau Bac+3 sinon tous les profs auraient des Master... ça se saurait.
"il y a des fonctionnaires de catégorie D"... Lui qui veut que la France regarde vers l'avant et accepte la réforme, il semble avoir oublié que les catégores D ont été supprimées en... 1988 ! Eh oui, 20 ans, ça passe vite.
"Les fonctionnaires cotisent 7,85% de leur traitement pour leur retraite, beaucoup moins que dans le privé", mais il ne précise pas que les cheminots cotisent 36% de leurs salaires bruts, beaucoup plus que dans le privé. Mais ça, on le dit pas.
"Le progrès de l'espérance de vie est colossal, on vit 25 à 30 ans après son départ en retraite"... 60+30 = 90. Espérance de vie à 90 ans, c'est pas mal, sauf que la moyenne française plafonne à 79 ans, et que le Japon est en tête à 82. On oublie aussi souvent de dire que les ouvriers ont cotisé pendant longtemps sans en profiter : leur espérance de vie était inférieur à l'age de départ à la retraite jusque dans les années 70, les ouvriers cotisaient pour leurs patrons.
"la greve des fonctionnaires coute des centaines de millions"... mais personne ne déduit les économies que représentent les traitements non versés (les grévistes ne sont pas payés, je le répète). Avec un salaire brut moyen dans la fonction publique d'Etat à 2540€ (a titre de comparaison, 2513€ dans le privé, mais les agents de l'Etat sont sensiblement plus diplômés que les salariés du privé, donc au final les agents du public sont moins bien payés), un jour de grève représente une économie de 85€, soit près de 130 millions rapportés au nombre de gréviste.

Mais rendons à Cesar... J. Marseille ne s'est pas trompé lorsqu'il s'est agit de compter les syndicalistes en France. Ils sont 1 880 000, soit près de 9% de la population salariée. Après une baisse continue des effectifs, ces derniers semblent stagner voire progresser légèrement. Mais rien ne vaut une petite lecture personnelle de ce dossier de la DARES.

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lundi 19 novembre 2007

Grèves, conflictualité, etc...

Deux articles qui valent la peine d'être lus, parus dans Libération ces jours-ci :

"La conflictualité ne décline pas, elle se transforme", une interview de Jean-Michel Denis, sociologue (Libération du 19 novembre)

"Le mythe d'un pays gréviste", une tribune de François Doutriaux, juriste (Libération du 14 novembre)

[EDIT]
Pour un autre point de vue, un billet publié sur le blog Ecopublix.eu
Des grèves partout, sauf dans les statistiques

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jeudi 15 novembre 2007

Socle commun et justice sociale

Dans le dernier numéro de l'Enseignant, la revue du Syndicat des enseignants-Unsa, on trouve une interview de François Dubet, sociologue de l'éducation. Il s'exprime sur la question du socle commun de connaissances et de compétences. Kezako le socle ? Je sors de 6 heures de formation sur ce thème, et j'y vois relativement plus clair. Quoique...
Prof de lycée, je ne devrai pas être amené à "pratiquer" ce socle puisque c'est le brevet des collèges qui valide la maîtrise des sept "piliers" qui composent le socle. Pour autant (et au risque de faire une belle lapalissade) on ne peut pas enseigner à des lycéens s'ils ne sont pas passés par le collège. Entendez par là qu'un prof de lycée fera mieux son travail si les élèves qu'il reçoit en début de seconde ont les pré-requis nécessaire à la scolarité dans ce que l'on appelle le cycle de détermination (seconde) et le cycle terminal (première et terminale). Alors c'est quoi le socle et qu'est ce qu'en pense François Dubet ?

Le socle fait partie de la loi Fillon de 2005
Le socle commun de connaissances et de compétences est défini par la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'École du 23 avril 2005 plus connue sous le nom de loi Fillon. Souvenez-vous, les manifs lycéennes, parfois violentes, soulevant une polémique intellectuelle, etc... C'était autour de cette loi qui contient, en outre du socle, le retour des bourses au mérite, la suppression des Travaux Pratiques Encadrés en Terminale, la suppresion du deuxième enseignement de détermination en classe de seconde, le non remplacement des enseignants pour des absences de moins de deux semaines. Le printemps 2005 est également marqué par le référendum sur Traité Européen, et le NON massif des français entraine le limogeage de François Fillon et l'abandon de certaines mesures de la loi par son successeur.

Les 7 piliers et 3 paliers
Le socle est donc devenu la référence en matière de rédaction des programmes et il repose sur sept piliers :
* la maîtrise de la langue française ;
* la pratique d'une langue vivante étrangère ;
* les principaux éléments de mathématiques et la culture scientifique et technologique ;
* la maîtrise des techniques usuelles de l'information et de la communication ;
* la culture humaniste ;
* les compétences sociales et civiques
* l'autonomie et l'esprit d'initiative.

Vaste programme, un peu fourre-tout quand on y regarde de plus près, dans lequel on trouve "Savoir nager" dans le septième pilier, à côté de "développer sa volonté de se prendre en charge personnellement" et "prendre conscience de l'influence des autres sur ses valeurs et ses choix". C'est une sorte de résultat de brainstorming organisé afin de définir le profil du collègien modèle en fin de 3ème. La barre est haute, et la multitude des exigeances prouve à ceux qui pensent encore que "le niveau baisse" que les élèves du XXIème siècle ont un niveau supposé de gestion et de compréhension de la complexité du réel bien plus élevé que leurs parents (et a fortiori leurs grands-parents) au même âge.

L'évolution de la maîtrise des compétences et connaissances est évalué à trois moments distincts de la scolarité :

* le premier, en fin de C.E.1, correspond notamment à l'acquisition de la lecture courante et de l'écriture ;
* le deuxième, au terme de l'école primaire, mesure en particulier l'acquisition des règles fondamentales de la grammaire, du calcul élémentaire et des quatre opérations ;
* enfin, le brevet des collèges atteste de la maîtrise des sept compétences du socle.

Un livret personnel permet à l'élève, à sa famille et aux enseignants de suivre l'acquisition progressive des compétences : il est expérimenté au cours de l'année scolaire 2007-2008. Déjà les livrets expérimentaux proposent quatre paliers, avec une évaluation en fin de 6e.

Justice sociale et lien social
François Dubet, dans l'interview que je mentionnais en introduction de cette note, met en avant deux raisons qui l'amènent à défendre le principe du socle commun. Tout d'abord le "socle" est pour lui un moyen de garantir une justice sociale, au sens de Rawls (pour faire rapide dans le modèle "Rawlsien", les inégalités sont justes et légitimes si elles ne réduisent pas la liberté des individus, ni l’égal accès aux positions sociales, et si elles profitent aussi aux plus défavorisés). Pour Dubet "la question fondamentale est de savoir quelles sont les compétences que les plus faibles ont pu acquérir. C’est beaucoup plus difficile d’obtenir une masse d’élèves maîtri­sant les compétences essentielles que de dégager une minorité de très bons élèves. En France, on accepte l’idée d’un salaire minimum, d’un niveau de santé élémentaire, de conditions élémentaires de logement... Étrangement, c’est un raisonnement qui ne passe pas facilement dans le monde scolaire, beaucoup trop méritocratique". Le socle garantirait donc l'égale maîtrise de compétences de base, allant ainsi vers plus de justice sociale.

Après avoir insisté sur le "socle" il trouve une deuxième raison de légitimer celui-ci à travers son qualificatif "commun". Dans une société éclatée culturellement et socialement, garantir des bases communes serait un gage d'unité sociale, une source de lien social : "Aujourd’hui, nous avons des programmes d’enseignement ambitieux. La plupart des élèves ne peuvent pas les atteindre. On leur propose donc de faire du soutien scolaire pour qu’ils rattrapent le train qu’ils n’ont pas pris. En général, ils le rattrapent assez peu. Moi je pense qu’il faudrait faire le contraire. On doit s’assurer que tous montent dans le train, ce qui ne doit nullement empêcher certains d’aller plus loin et plus vite. Mais cela ne va pas être aux dépens de ce que tous les élèves savent faire".

J'aimerais être aussi confiant que François Dubet quand à l'efficacité d'un tel socle. Mais j'ai encore quelques doutes. L'avenir nous le dira. Les programmes du collège vont être mis en conformité avec le socle progressivement. Déjà quelques élements sont mis en place pour l'année 2007-2008 tel que le Brevet Informatique et Internet (B2i) qui devient obligatoire en vue de l'obtention du Brevet des collèges.

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mercredi 14 novembre 2007

Le Contrat Nouvelle Embauche (CNE) est mort

Le CNE a vécu, il est mort. L'Organisation International du Travail l'a recalé car il ne respectait pas les deux principes fondamentaux du droit du travail que sont :
1. Le caractère raisonnable de la période d'essai
2. La motivation de tout licenciement

Je rappelle que le CNE était destiné aux entreprises de moins de 20 salariés. Il permettait à l'employeur de rompre le contrat de travail de manière unilatérale et sans motivation durant une période dite "de consolidation" de deux années qui suit la signature du contrat.

Voila la dépêche de l'AFP qui rend compte de l'avis de l'OIT réunie ce mercredi à Genève :

La France se pliera à l'avis de l'Organisation internationale du travail (OIT) condamnant le Contrat nouvelles embauches (CNE) mais réclame un "espace" pour négocier la flexibilisation du marché du travail, a déclaré mercredi le délégué de la France, M. Gilles de Robien.

Le gouvernement français "veillera à ce que les recommandations (de l'OIT) soient prises en compte", a annoncé M. de Robien devant le Conseil d'administration de l'OIT, réuni à Genève.

"Nous souhaitons que l'interprétation des conventions ratifiées (de l'OIT) laisse au gouvernement et aux partenaires sociaux un espace pour dynamiser la création d'emplois", a ajouté le représentant de Paris auprès de l'OIT.

La France est "engagée par les orientations dites de flexi-sécurité qui sont promues au niveau de l'Union européenne", a encore fait valoir M. de Robien.

"Le développement de l'emploi et la recherche de politiques actives du marché du travail qui combinent, d'une part, une plus grande flexibilité pour faire face au défi de la compétitivité que nous impose la mondialisation et, d'autre part, une véritable sécurisation des parcours professionnels des travailleurs, sont actuellement en France au coeur des négociations entre les partenaires sociaux", a souligné le représentant de la France.

L'OIT a "laissé une porte ouverte", a estimé un diplomate français en soulignant que l'organisation "n'exclut pas la possibilité que se justifie une période plus longue" que six mois de période d'essai.

Le patronat et les syndicats français ont engagé en septembre dernier des négociations particulièrement intenses.

Le patronat souhaite obtenir des assouplissements au contrat de travail, qui passeraient notamment par un allongement de la période d'essai et la possibilité pour un employeur de se séparer à l'"amiable" d'un salarié. La période d'essai proposée pourrait atteindre six mois, voire un an pour les cadres.

Le CNE, en vigueur en France depuis août 2005, a été recalé mercredi par l'Organisation internationale du travail (OIT) qui a estimé qu'une période d'essai de deux ans n'est pas "raisonnable".

En outre, un contrat de travail ne peut être rompu "en l'absence d'un motif valable", a tranché l'organisation.

Créé en août 2005 malgré l'opposition des syndicats, le CNE est un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) destiné aux entreprises de moins de 20 salariés. Il débute par une période de deux ans, dite "période de consolidation" pendant laquelle l'employeur peut licencier son salarié sans avoir à fournir de justification. Il a été beaucoup utilisé par des employeurs du bâtiment.

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Du bon usage des mots en temps de grèves

On oublie souvent le pouvoir des mots. En ces temps de mouvements sociaux, il est toujours bon de relire cet article paru sur Acrimed en 2003, plus que jamais d'actualité.

>>> Lexique pour temps de grèves et de manifestations


Toujours à propos des grèves, il y a quelques mois je publiais deux notes sur le droit de grève et le service minimum que l'on peut toujours lire ici et .

Pour relire ma note sur la valeur des sondages d'opinion, c'est par ici.

A noter également la création par la SNCF d'une page spécialement dédiée aux divers Powerpoint et documents qui circulent dans vos boites mails pour dénigrer l'entreprise et ses salariés : halte aux idées reçues. J'avais d'ailleurs relayé un article paru dans Libération (et qui ne doit plus être librement accessible à présent) mais que vous pouvez relire ici sur la pénibilité du travail de cheminot.

Plus que jamais, il est impératif d'exercer votre esprit critique à l'égard des raccourcis journalistiques et des élans de "bon sens" tellement tentant et courant ces jours-ci.

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mardi 13 novembre 2007

Mesdames, messieurs... Les chiffres du chômage !

Version modifiée du 13 novembre

Retenez votre souffle, ils sont sortis. On en a parlé pendant la campagne présidentielles. Les voila. Mesdames, messieurs, roulement de tambour... TaDam ! Les chiffres "officiels" du chômage en 2006. En presque exclusivité, et avant le journal de 20h00.

C'est dans le dernier numéro d'INSEE Première que vous trouverez les explications que l'on attendait depuis des mois : les fameux résultats de l'enquête emploi qui paraissent habituellement au printemps, et qu'on a bizarement servis à l'automne cette année... Au détour d'une note sur l'évolution du chômage depuis le début 2006, on apprend le résultat de cette fameuse Enquête Emploi que l'INSEE et la Dares n'avait pas été en mesure de communiquer en avril dernier. Tout ça pour apprendre que :
En moyenne pour l’année 2006, comme en 2005 et en 2004, il s’établit à 8,8 % de la population active pour la France métropolitaine, soit 2,4 millions de personnes.
Bref ça ne bouge pas des masses depuis trois ans, quoi qu'en fasse les gouvernements... de droite (hop, voila, ça y est c'est dit... Mais la mauvaise foi a des limites : les statistiques sont souvent trompeuses). Avant de partir, n'oubliez pas de jeter un oeil au communiqué de presse d'ACDC (les Autres Chiffres Du Chômage) histoire de confronter les points de vue !

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jeudi 8 novembre 2007

Les pauvres, la santé et les franchises médicales

Olivier Bouba-Olga revient sur son blog sur le bulletin INSEE Première n°1162 consacré à une étude qui différencie régions riches et régions pauvres. Je vous incite à lire ce Insee Première ainsi que la petite note d’OBO forte intéressante, avec des petits calculs qui en disent long.

Mais ces jours-ci mon attention a plutôt été retenue par le numéro précédent d’INSEE Première, le n°1161 consacré à la santé des pauvres. Dans cette note la pauvreté est entendue dans sa définition européenne, c'est-à-dire qu’est considérée comme personne à bas revenu toute personne dont les revenus ne dépassent pas 60% du niveau de vie médian. Avec toutes les imperfections qui caractérisent ce genre de définition : quid de celui qui est à 60,01 %

A l’heure où le débat sur l’instauration des franchises médicales est encore vif en France – bien que le texte ait été voté à l’assemblée le 6 novembre, pour une mise en place dès le 1er janvier 2008 – la lecture de cette note de l'INSEE est plus qu’intéressante.

Pas de progressivité

En effet, contrairement aux autres pays d’Europe où elle est instaurée, la franchise médicale à la française ne prévoit aucune progressivité. Que votre salaire soit nul, que vous soyez pris en charge par la Couverture Maladie Universelle, ou bien que vous vous appeliez Arnaud Lagardère, vous paierez la même franchise médicale. Or toutes études de sociologie de la santé montrent que les pauvres se soignent moins bien que les riches. Par méconnaissance du système (et notamment des rôles des différents spécialistes), par un rapport au corps et à la médecine différent de ceux des classes plus aisées de la population (on va chez les médecins quand on va vraiment mal… c’est-à-dire souvent trop tard), les pauvres ont un taux de morbidité (probabilité de tomber malade) et un taux de mortalité (pas besoin d’expliquer) bien supérieur aux classes favorisées. Il y a donc fort à parier que les franchises médicales ne vont pas améliorer la situation pour cette population, en l’éloignant encore un peu plus le domaine de la santé.

La santé des pauvres
L’étude de l’INSEE met en avant plusieurs points qui viennent confirmer ce que les autres études ont déjà surligné par le passé. En clair, les pauvres consultent moins les médecins, et particulièrement les spécialistes ; ils se déclarent plus souvent en mauvaise santé que le reste de la population ; dans la suite du premier élément, les problèmes dentaires sont surreprésentés ; les enfants pauvres subissent tout autant que leurs parents, si ce n’est plus, l’éloignement vis-à-vis du corps médical ; et enfin les pratiques de dépistages et de prévention sont beaucoup moins fréquentes chez les personnes appartenant aux ménages les plus modestes. Il n’est donc pas étonnant de retrouver une surreprésentation de cette population chez les personnes atteintes du cancer du colon, des seins ou de l’utérus : pas de dépistage a priori mais un diagnostic a posteriori.

La raison première avancée est tout simplement la question du financement de la santé. Face au non remboursement des appareils dentaires ou des lunettes, ou même à cause du fait d’avancer le coût de la consultation et de ne pouvoir bénéficier du tiers payant, les ménages hésitent à se soigner. Et ce même avec la mise en place de la CMU : certains ne font pas la démarche de demander à en bénéficier, probablement parce que bénéficier de la CMU revient à être « étiqueter » comme pauvre (voir la notion d'étiquetage chez H. S. Becker), mais il y a également un effet de seuil qui conduit une partie non négligeable de la population modeste à dépasser les plafonds de ressources. Ainsi on peut lire dans l'étude de l'INSEE :
Ces écarts en matière de santé peuvent en effet provenir de la contrainte financière qui pèse sur les plus pauvres, malgré la mise en place de la couverture maladie universelle (CMU) et de sa complémentaire. D’une part, les plus pauvres ne demandent pas toujours à en bénéficier, d’autre part, leurs ressources peuvent être supérieures au plafond requis pour l’affiliation. Ainsi, 22 % des individus ayant de faibles revenus n’ont pas de complémentaire santé (CMU comprise) alors que ce n’est le cas que de 7 % du reste de la population.

Dans ces conditions, on a du mal à croire que les franchises médicales à la française n’aient pas un impact sur les dépenses de santé des plus démunis. Ces franchises amènent donc une modification profonde de notre façon de penser la solidarité.

Ailleurs… l’exemple de la Suisse

Laurent Mossu, correspondant à Genève pour France Inter, rapportait ce matin que la franchise annuelle en Suisse avait permis de réduire de 20% les dépenses de santé « à qualité de soin constante ». La franchise est fixée à 300 Francs Suisse (187€), plus une quote-part de 10% (sur toutes les dépenses de médecin, de médicaments ou d’hospitalisation) qui reste à la charge du malade jusqu’à un maximum de 437€. « Grosso modo, nous dit Laurent Mossu, 15% des dépenses de santé sont couvertes par les malades », et le gouvernement suisse a pour projet de faire doubler la quote-part. « Il considère que cette participation additionnelle est parfaitement supportable, ne pénalisant pas les patients atteints de maladies chroniques, ou à coûts élevés ». A croire qu’il n’y a pas de pauvre en Suisse…

(à vous de déterminer si cette dernière phrase relève du premier, du second ou du troisième degré)

Sources :

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